Page:Revue de Métaphysique et de Morale, vingt et unième année - 1913.djvu/790

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2. La théorie qualitative.


Dans les cas élémentaires, l’expression des inconnues par les symboles usuels fournit en général aisément à leur égard tous les renseignements que l’on se propose d’obtenir.

C’est ce qui se passe d’ailleurs pour tous les problèmes mathématiques suffisamment simples.

Pour peu que la question se complique, il en est autrement et, tout au moins, on peut dire que la lecture, si j’ose m’exprimer ainsi, faite par le mathématicien des documents qu’il possède, comporte deux grandes étapes, l’une que l’on peut appeler qualitative, l’autre quantitative.

« Ainsi, par exemple, pour étudier une équation algébrique, on commence par rechercher, à l’aide du théorème de Sturm, quel est le nombre des racines réelles : c’est la partie qualitative ; puis on calcule la valeur numérique de ces racines, ce qui constitue l’étude quantitative de l’équation. De même, pour étudier une courbe algébrique, on commence par construire cette courbe, comme on dit dans les cours de Mathématiques spéciales, c’est-à-dire qu’on cherche quelles sont les branches de courbes fermées, les branches infinies, etc. Après cette étude qualitative de la courbe, on peut en déterminer exactement un certain nombre de points ».

« C’est naturellement par la partie qualitative qu’on doit aborder la théorie de toute fonction et c’est pourquoi le problème qui se présente en premier lieu est le suivant : Construire les courbes définies par des équations différentielles.

« Cette étude qualitative, quand elle sera faite complètement, sera de la plus grande utilité pour le calcul numérique de la fonction.

« ... D’ailleurs cette étude qualitative aura par elle-même un intérêt de premier ordre. Diverses questions fort importantes d’Analyse et de Mécanique peuvent en effet s’y ramener[1]… »


Ainsi l’étude qualitative de la variation d’une grandeur ou du déplacement d’un point est indispensable à la fois en elle-même et comme précédant presque nécessairement l’étude quantitative.

  1. Poincaré, Premier Mémoire sur les courbes définies par les équations différentielles.