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HISTORIQUE

DE « L’AME EN FOLIE[1] »

Trois tribus principales, cerfs, chevreuils et sangliers se partageaient donc la forêt, chacune possédant son caractère national bien tranché, et il est temps de dire dans quel esprit je les observais.

Dès mes années de collège, au souvenir des scènes de la vie animale qui m’avaient frappé dès ma plus tendre enfance, je suis allé de moi-même vers des idées dont nos maîtres nous préservaient soigneusement et qui étaient en train de renouveler, aux regards de l’humanité, l’aspect de l’univers. Lorsque plus tard j’ai retrouvé ces mêmes idées sous forme de doctrines nettement définies, j’ai pu les saluer comme de vieilles amies. Quelle part de vérité me révélaient-elles ? Cela importe peu à la clarté de mon récit. La question n’est pas de savoir si j’avais raison de les accueillir : je les accueillais. J’étais un évolutionniste convaincu.

On voit tout de suite quelle sorte d’intérêt je portais aux grands mammifères que je poursuivais. Leurs ancêtres avaient été cousins des miens avant de se laisser dépasser par eux, mes cerfs étaient encore ce qu’étaient les cerfs il y a des centaines de milliers d’années. En les contemplant je me pla-

  1. Voir la Revue de Paris du 15 février 1922.