Page:Revue de Paris, 29è année, Tome 2, Mar-Avr 1922.djvu/676

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Ces chiffres — depuis lors quelque peu modifiés — indiquent un système d’éducation sans équilibre. Des efforts furent faits en ces dernières années pour développer l’instruction primaire et pour rendre les Universités dignes de l’Inde ; mais, cette fois encore, il était trop tard pour changer la situation. D’année en année, les établissements d’éducation laissèrent sortir des milliers d’Indiens, qui, pour la plupart, ne trouvèrent aucun emploi convenant à leurs titres trompeurs. La profession d’homme de loi fut incroyablement encombrée, et le résultat général fut la création d’une classe sans cesse plus nombreuse, imbue d’idées démocratiques occidentales incomplètement comprises et prête à consacrer son activité à la préparation d’une révolution. Une classe de cette sorte n’est nullement en sympathie avec les masses de l’Inde et ne représente en rien les opinions de la majorité énorme des Indiens qui « ne parlent pas anglais » et dont l’instruction fut négligée par suite de l’erreur commise par Lord Macaulay en 1855. Il est significatif que les organisations qui cherchent maintenant à briser l’autorité britannique tiennent leurs meetings en anglais et se servent des jeunes étudiants pour atteindre leurs buts.

Dans sa critique générale du système judiciaire compliqué employé par nous dans l’Inde, M. Chailley remarque :

Ils ont commis l’erreur d’introduire — avec la meilleure des intentions — des garanties et des formalités qui entraînent des frais et causent des retards. Elles sont odieuses à tous, sauf à une partie peu nombreuse de la population.

Cette critique est fondée. Notre justice est trop coûteuse, trop compliquée pour être comprise de cette simple et primitive population. Elle permet d’interminables appels entraînant de longs délais, et tourne au seul avantage de la classe parasite des hommes de loi qui exploitent les tendances processives du peuple. Le Code Civil dépasse la compréhension d’Orientaux illettrés et leur donne fréquemment une impression d’injustice. Des réformes de détail seraient possibles, mais toute tentative pour adapter le système à la vie hindoue serait violemment combattue par l’Intelligentsia.

La population totale de l’Inde est actuellement à peu près de 320 millions d’habitants ; sur ce chiffre, plus de