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Ils prient deux fois par jour, au lever du soleil et à son coucher. La journée est consacrée à méditer sur les saintes Écritures, on cherchant des allégories dans la philosophie des Pères. Les thérapeutes, en effet, sont persuadés que le sens littéral cache toujours un sens mystérieux. Ils possèdent des livres écrits par les anciens fondateurs de la secte, et où le modèle de la méthode allégorique est donné. Ils composent ainsi à la louange de Dieu des cantiques et des hymnes, de vrais psaumes de cadences diverses, qu’ils chantent sur des rythmes graves et variés. Le jour entier est rempli par l’étude ; toutes les nécessités du corps sont réservées pour la nuit. Quelques-uns arrivent à ne manger que tous les trois jours ou même plus rarement encore.

Telle est leur vie pendant six jours de la semaine. Pendant ces six jours, ils ne sortent pas de leur case, ni même ne jettent un regard dehors. Le septième jour, ils se réunissent dans un semnée commun, divisé en deux par un mur de trois ou quatre coudées. Les thérapeutrides, en effet, sont admises à ces réunions ; le mur n’empêche pas les voix de se réunir, et il pare aux inconvénients de la promiscuité.

Les confrères s’assoient par rang d’âge, dans une altitude recueillie. Le plus âgé et le plus consommé en doctrine s’avance et parle gravement, simplement. On l’écoute en silence, sans se permettre autre chose que des signes discrets d’approbation. Philon insiste sur la discrétion que chacun met à soutenir son opinion et à combattre celle des autres. Le contraste avec les controversistes vaniteux de Jérusalem est finement indiqué. On sent que la bonne éducation de Philon et ses manières exquises d’homme du monde avaient été souvent froissées par le verbe haut et le ton tranchant de ces scolastiques impertinents.

Après le service religieux, les solitaires donnent au corps quelque relâche. Ils mangent du pain assaisonné de sel ; les délicats y joignent un peu d’hysope. Leur grande fêle est la Pentecôte. Le repas est la partie essentielle de la fête. Ils se réunissent en habits blancs[1], portant sur leur figure les signes d’une joie contenue. D’abord, ils se mettent en rang et prient,

  1. Comme les esséniens. En général, la messe des thérapeutes ressemble fort à celle des esséniens.