Page:Revue de métaphysique et de morale, 1896.djvu/36

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IDÉES CONCRÈTES ET IMAGES SENSIBLES

On sépare communément les êtres, les choses et les faits réels des idées, et, par idées, on entend d’ordinaire l’idée générale et abstraite, ou concept. Cependant les objets réels ne sont pas seulement des objets de perception et ils ne correspondent pas qu’à des images dans l’esprit ; ce sont aussi des objets dépensée, de même que les concepts, et, comme eux, ils correspondent à des idées, les idées concrètes.

Les idées concrètes sont des idées particulières. Nous voulons dire par là qu’elles résument nos expériences à l’égard d’objets déterminés et perceptibles, considérés sous le rapport de leurs caractères distinctifs, et indépendamment des caractères qu’ils possèdent en commun avec d’autres objets. Or, parmi ces idées, il en est qui sont au plus haut point douées de la propriété de distinguer et d’isoler leur objet ; ce sont celles que l’on peut appeler idées singulières, qui se rapportent à des objets réels et singuliers, uniques de leur espèce, les idées dénotées par les noms propres. Elles méritent un examen tout particulier. Si l’on recherche, en effet, par quoi elles se distinguent des images sensibles, avec lesquelles elles sont néanmoins en relation presque immédiate, on découvrira, peut-être plus aisément qu’en s’adressant aux idées désignées par les noms génériques, déjà abstraites et générales, la raison et la nature véritable de la différence psychologique entre la perception et l’idéation. Mais, dira-t-on, peut-on admettre qu’il y ait des notions singulières, et cette expression n’est-elle pas contradictoire dans les termes

? Ce que Vous appelez ainsi ne se compose-t-il pas visiblement 

d’une image sensible associée, d’une part, à un nom, et, d’autre part, à des idées générales ? L’image, élément primitif du groupe, serait avec le nom tout ce qui constitue la singularité de l’objet pensé, et