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98 REVUE DE MÉTAPHYSIQUE ET DE MORALE.

le meilleur moyen d’atteindre le but, c’est de le dépasser1. Il est donc vain de chercher dans l’Analyse un fondement mathématique pourl’atomisme, qu’elle contredit au contraire dans la mesure où. elle s’applique aux phénomènes naturels.

Ce fondement se trouve encore bien moins dans la Géométrie pure, qui, comme l’auteur l’avoue, paraît fournir plus de raisons pour ruiner l’atomisme que pour le fonder (p. 24) ». Il n’a pu soutenir le contraire qu’en affirmant l’immanence du nombre dans la figure, et en réduisant l’intelligibilité du continu géométrique à celle du nombre ; or, cette thèse paradoxale, qui est aussi la racine de son interprétation du Calcul infinitésimal, nous semble bien difficile à prouver. En premier lieu, la considération de la quantité ne s’introduit pas en Géométrie par la définition de la ligne droite, d’abord, parce que la proposition « La ligne droite est le plus court chemin entre deux de ses points n’est pas la définition de la droite, mais un théorème démontrable et démontré2 ; et ensuite, parce que, en tout cas, cette propriété de la droite n’intervient dans aucune démonstration de Géométrie élémentaire. En revanche, la propriété caractéristique de la droite, la seule qui soit invoquée dans les raisonnements, à savoir d’être unique entre deux points donnés (qu’elle lui serve ou non de définition), ne peut se déduire de la définition proposée. En effet, de ce que la ligne droite est le plus court chemin entre deux points, il ne résulte pas qu’elle soit unique car il pourrait y avoir plusieurs « plus courts chemins » égaux, et même une infinité s. Bien plus, il n’y a aucune raison pour que tous les « plus courts chemins soient égaux entre eux car, en général, une fonc-I tion peut avoir plusieurs maxima ou minima différents 4. Ainsi la prétendue définition de laligne droite ne permet pas de démontrer sa propriété essentielle, et, au contraire, elle se démontre quand on définit la droite par cette propriété ou par une propriété équivalente (telle que l’homogénéité), qui n’implique aucune idée de quantité. D’une manière générale, la considération des grandeurs n’est pas . VoirRenouvier, les Principes de la Nature, t. I. p. 36-37 et p. 65 (chap. m et appendice C).

. Cf. Revue de Métaphysique et de Morale, t. I, p. TI. .Par exemple, sur une sphère, ie plus court chemin entre deux pôles est l’un quelconque des méridiens.

. C’est ainsi que, sur un cylindre circulaire, il y a un nombre infini de « plus courts chemins » (c’est-à-dire de géodêsiques) entre deux points donnés, et tous inégaux.