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J.-J. GOURD. – LES TROIS DIALECTIQUES. 7

reprend à sa manière. Sans’ nier les conclusions de la théorie pure – d’ailleurs, elle ne pourrait s’en passer pour son propre compte, – elle se poursuit selon des lois spéciales, et son oeuvre, relativement à celle de la dialectique précédente, constitue une sorte de retour à la conscience primitive. Elle-même, à son tour, a besoin du contrepoids d’une troisième dialectique. Car elle aussi, en son propre domaine, s’éloigne de la conscience primitive, et il est bon que les éléments qu’elle abandonne soient repris au cours d’un nouveau mouvement. C’est à cela que se consacre la dialectique religieuse. Entre celle-ci et la dialectique pratiqùe,il n’y apas plus de contradiction qu’entre la dialectique pratique et la science les conclusions de l’une et de l’autre peuvent être simultanément gardées, <, car elles sont tirées à des points de vue tout différents et cependant lorsque l’une s’éloigne de la conscience primitive, l’autre fait effort pour-y revenir. – Y revenir à vrai dire, ce n’est pas possible. Mais voici, par l’action combinée des diverses dialectiques, nous pouvons L t espérer une nouvelle conscience primitive ; plus forte, plus riche que la précédente ; plus forte et plus riche de tout ce que gagnent les i analyses et les classifications. C’est là la plus haute récompense de notre artifice intellectuel. Grâce à lui, nous faisons plus que subvenir indirectement à la faiblesse originaire de notre conscience, nous nous préparons un meilleur point de départ pour des coordinations ultérieures. `

Malheureusement le principe de la multiplicité des dialectiques est encore bien conteste, tout au moins bien négligé. Depuis Kant, on a pris au sérieux la dialectique pratique, mais sans lui donner tout ’appui et toute l’extension désirables. Kant lui-même ne l’a pas suffisamment dégagée de la dialectique" théorique. Il a beau dire, ses conclusions morales sur Dieu, sur le sujet identique et persistant, ont un caractère plus théorique que pratique. Et ses successeurs les plus récents n’ont point fait disparaître les confusions de sa pensée. Quant à la dialectique religieuse, ce n’est pas chez les théologiens traditionnels qu’il serait facile de la trouver. Si leur inspiration est religieuse, en tout cas .leurs formules ne le sont guère. Allons plutôt i chez les mystiques. Mais comme ils sont vagues, incompréhensibles, j dénués d’esprit vraiment scientifique ! Si donc l’on concevait lai philosophie comme la dialectique prenant conscience d’elle-même r – que cette définition ne préjuge point la question du subjectivisme !– la tâche de la philosophie consisterait surtout mettre