Page:Revue de métaphysique et de morale, 1897.djvu/381

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v. delbos. -– Matière et mémoire. -3T7

fluence de notre corps. Mais si la division de la matière en individualités indépendantes est simplement relative à notre action possible sur elle, l’hypothèse des atomes’ ne peut être que schématique et provisoire. En effet, bien qu’il n’y ait aucune raison pour représenter l’atome comme solide plutôt que comme liquide on gazeux, on se le figure solide, parce que les solides sont les objets sur lesquels nous avons le plus de prise ; et d’un autre côté on parle d’un choc entre les atomes parce que le ’contact est le seul moyen dont nous semblons disposer pour faire agir notre corps sur les autres corps. Mais des expériences simples montrent que la solidité est loin d’être un état parfait et tranché de la matière et qu’il n’y a pas non plus de contact réel entre deux corps qui se poussent ; en outre, toutes les tentatives destinées à approfondir la nature de l’atome aboutissent à en dissoudre la solidité et l’inertie, soit dans des mouvements, soit dans des lignes de force dont la solidarité réciproque rétablira la continuité universelle.

Or l’introduction de ces derniers symboles tend à vérifier ce que l’analyse psychologique du mouvement nous avait appris, à, savoir qu’il se produit dans l’étendue concrète des modifications, des changements de tension et d’énergie, rien de plus. Dès lors, on -a le droit de éonclure que le mouvement est plutôt le transport d’un état que d’une chose. Mais cette conclusion suppose qu’il y a dans le mouvement des qualités et non pas seulement la quantité pure et homogène. Au fait, si le mouvement représenté dans l’espace n’est que -la figure abstraite du mouvement qui s’accomplit dans la durée, quelles raisons aurions-nous d’exclure du mouvement vrai ce qui n’est incompatible qu’avec le mouvement abstraitement représenté ? Et puisque d’ailleurs notre perception, comprend un état de notre -conscience et une réalité distincte de nous, comment expliquerait-on .le passage de la réalité, si elle était purement quantitative, à notre -état de conscience, qualitativement déterminé ? Il faut donc admettre e qu’il y a de la qualité dans le mouvement, que le mouvement réel n’est que la qualité même, vibrant pour ainsi dire intérieurement et -scandant sa propre existence en un nombre incalculable de moments. Par suite la distinction de la matière et de l’esprit doit être posée en fonction du temps plutôt qu’en fonction de l’espace ce qui distingue la matière de l’esprit, c’est que les changements qui s’accom--plissent en elle suivent un rythme de durée infiniment rapide par ,rapport au rythme de durée de notre propre conscience, c’est qu’ils