Page:Revue de métaphysique et de morale - 1.djvu/180

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procèdent[1]. » Ainsi tout mouvement réel implique l’infini du temps et de l’espace et leur est antérieur.

Le temps et l’espace métaphysiques « ont donc les mêmes caractères que l’analyse nous avait conduit à attribuer aux êtres vivants, c’est-à-dire ce sont des unités véritables et des essences indivisibles ». Mais on ne peut les poser à part des êtres vivants. C’est le vivant qui, en définitive, est la seule réalité concrète. Le temps et l’espace abstraits ne sont que des formes « sous lesquelles va se déployant l’unité métaphysique de l’être vivant ». Ainsi donc, au point de vue métaphysique, c’est le vivant qui fonde le temps et l’espace. Chaque être vivant exprime la réalité de l’univers ; mais, d’autre part, on ne doit pas considérer l’univers comme une totalité d’êtres ; il n’y a donc au fond de réel que les organismes particuliers. Telle est la conclusion cosmologique à laquelle M. Dunan est arrivé.

M. Dunan examine ensuite à la lumière de ses principes les plus grandes questions de la philosophie. D’abord les vivants sont-ils en nombre fini ou infini ? La question doit se résoudre comme Leibniz l’avait pensé, à savoir, qu’ils ne forment pas un nombre à cause de leur hétérogénéité absolue. La question de l’infinité du temps et de l’espace se résout de même par la substitution d’un temps et d’un espace métaphysique à la durée et à l’étendue empiriques. De même si l’on demande dans quel sens on doit dire que l’univers est un : on ne peut le concevoir comme une totalité de phénomènes qu’unirait la causalité scientifique, car la causalité scientifique ne peut se comprendre tant qu’on ne la rattache pas à une substance réelle. Comment concevra-t-on maintenant cette substance et le lien qui l’unit au monde sensible[2] ? Cet absolu est-il un et immuable, comme le veut Spinoza, ou concret et mobile, comme le prétend Leibniz ? « L’absolu un et immuable existe sans doute ;… mais cet absolu-là n’est pas la substance de laquelle les phénomènes procèdent ;… il habite une région différente et supérieure. «Si l’absolu était un et immuable, il serait une chose selon l’expression de Fichte, il serait vide et indéterminé. Il serait impossible de faire sortir d’une telle conception la nature et les chose individuelles. « Il faut que l’absolu même devienne et se transforme. » L’unité du monde n’est pas abstraite et mécanique, mais concrète et vivante. « Le vivant est la cause métaphysique et par conséquent la cause effective et réelle de tout ce qui se produit dans son corps : c’est-à-dire que chaque vivant ayant pour corps l’univers tout entier, est par son unité métaphysique la cause de tous les phénomènes de l’univers en tant qu’ils appartiennent à ce corps[3] » M. Dunan indique, en terminant, le sens que prennent, au point de vue de son système, les idées de la raison, la liberté notamment.

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