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VARIÉTÉS.

Ssahhrâ, on dit qu’il parcourut aussi, avide d’instruction et de science, diverses contrées de l’Afrique ; mais il ne paraît point qu’il ait fait le saint pélerinage de la Mekke.

C’est au mois d’avril 1828, c’est-à-dire pendant la lune sainte de Ramadhân[1], que Mohhammed ben A’mar revint à Souymah. Ses yeux étincelans, ses lèvres muettes et pourtant agitées, toute sa physionomie, accusaient en lui l’existence de pensées extraordinaires, de mouvemens intérieurs incompréhensibles. Ses concitoyens stupéfaits, effrayés, le crurent en démence, et, d’après les usages héréditaires, bâtirent au malheureux une case distincte en dehors de l’enceinte commune. Mohhammed, la tête haute, les bras croisés sur la poitrine, silencieux et fier, traversa cette foule que son regard rendait stupide de crainte, et prit possession de son habitation nouvelle. À peine entré dans la hutte, il frappa la terre de son front et demeura, dit-on, douze jours entiers en prières, observant le jeûne le plus absolu.

Le treizième jour, il reparaît à Souymah ; c’était l’heure de la prière d’al-assri[2]. Ses traits beaux et imposans, sa démarche noble, grave, et pourtant aisée, tout en lui appelait l’attention. Il prend la parole : sa voix était tonnante, son éloquence irrésistible, nous disent les rapports venus de ces contrées ; et les Imâms, les Marabouths de tout âge, de tout rang, saisis d’enthousiasme à ses prophétiques discours, se déclarent ses disciples, et réclament de lui leur confirmation ; le peuple transporté s’écrie qu’il est le Mahdy tant annoncé, et si long-temps attendu…

Les partis politiques, qu’une rivalité toujours subsistante

  1. Le Ramadhân avait commencé le 18 mars et devait finir le 17 avril : tout le monde sait que c’est le temps du jeûne et du recueillement pour les musulmans. Il est, en outre, intéressant de remarquer ici que c’est dans la lune de Ramadhân que Mahomet lui-même avait reçu sa mission divine.
  2. La prière de l’après-midi, qui se fait vers trois heures de relevée.