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PROJET D’UNE INVASION DE L’INDE.

nombreux troupeaux. Mais les bords du Gihon, du Sogd et du Sir sont remarquables, au contraire, par une extrême fertilité. Placé sous le même parallèle que l’Espagne et la France, le sol rapporte toutes sortes de grains et de fruits. Le murier, le coton, l’olive, le riz et la vigne y croissent sans effort. D’innombrables canaux y favorisent l’agriculture, et les provinces de Sogd et de Khiva peuvent être comparées, en plusieurs endroits, à un beau jardin.

Un commerce considérable d’échanges répand de tous côtés la richesse et l’activité. Le tiers de Bokhara se compose de caravanserails et de boutiques. On y trouve toute l’année, ainsi qu’à Samarcande, des Afghans, des Persans, des Indiens, des Chinois, des Russes. L’industrie même y a élevé des manufactures ; et ses étoffes de soie et de coton, ses magnifiques robes brodées en fil d’or sont recherchées depuis long-temps sur tous les marchés de l’Asie.

Ainsi, un voyage à travers la Tartarie indépendante n’offre pas autant d’obstacles qu’on pourrait d’abord le croire. Les steppes des Kirghis sont sillonnées chaque année par les caravanes russes d’Orembourg ; c’est là que le voyage est le plus pénible. Mais une fois dans le Khârezm, du moment qu’on a atteint les bords du Gihon et les prairies de Khiva, les communications ne semblent pas plus difficiles que dans plusieurs pays de l’Europe, et une armée pourrait même y vivre dans l’abondance.

Il n’y a donc pas à s’étonner si les regards du cabinet russe se sont tournés depuis long-temps vers la Tartarie. L’acquisition de cette contrée placerait dans ses mains tout le commerce de l’Asie centrale, de même que la conquête des provinces turques de l’Euphrate ferait passer en son pouvoir celui de l’Asie occidentale. Mais il trouverait dans cette possession des résultats beaucoup plus importans encore. La Tartarie lui ouvrirait les portes de l’Inde !…

Conquérir l’Inde tôt ou tard, en expulser la domination