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HISTOIRE.

maux qu’il avait soufferts et attaché plus que jamais à sa religion qu’il voyait abattue. Il n’est pas étonnant que des causes aussi différentes aient produit des résultats également différens en Europe et en Asie.

Les Turcs, qui avaient passé pour la première fois les Dardanelles au 14e siècle, sous Orkhan Ier, avaient conquis le continent de l’Europe jusqu’à la Thessalie exclusivement, à la fin du même siècle, sous l’empire de Bajazet. La Morée ne fut soumise que par Mahomet ii, après la prise de Constantinople, qui eut lieu en 1453. Les Vénitiens la reprirent en 1685 ; le traité de Passarowitz la rendit de nouveau aux Turcs en 1718. Le simple rapprochement de ces dates indique déjà qu’il doit y avoir dans les diverses parties qui constituent la Grèce une grande différence pour la composition de la population. La Morée a été le dernier asile des Grecs ; pendant la courte occupation des Vénitiens, un grand nombre est venu s’y réfugier des parties voisines de la Roumélie, et c’est à ces émigrations qu’on doit sans doute ces peuplades d’origine albanaise qu’on trouve en Achaïe, en Corinthie, en Argolide, et sur les îles qui l’avoisinent. Les Turcs, en y rentrant, n’y sont plus du reste venus comme à l’époque de leurs premières conquêtes. Ce n’était plus un peuple entier qui se précipitait comme un torrent, c’était une colonie militaire qui venait occuper un pays qu’on voulait maintenir. Aussi, tandis que les Turcs ne formaient guère, comme je l’ai dit, que le trentième de la population en Morée, on les