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DES GRECS MODERNES.

le plus de droits à leur constante sollicitude. C’est l’absence totale de ces mesures dans la Grèce qui peut excuser en quelque sorte certaines entreprises révoltantes sans doute, quand on les considère en elles-mêmes, par exemple, celle de lord Elgin à Athènes, dont on a tant parlé. »

On voit que M. Brondsted ne se dissimule pas la décadence et la dégradation dans laquelle est tombée la Grèce. « Je demanderai seulement, ajoute-t-il, si un peuple européen, quel qu’il soit, après quatre siècles d’un honteux esclavage, ne serait pas encore plus dégénéré ? Telle est, à moi, ma conviction intime et profonde. J’ai éprouvé si souvent et si vivement l’influence désorganisatrice du système des Turcs sur tout ce qui s’appelle raya, qu’après un séjour de trois ans dans la plupart des provinces grecques, j’ai dû m’étonner de ce que les Grecs ne sont pas dégénérés tout-à-fait, bien plus que de ce qu’ils paraissent dégénérés. Mais laissant de côté pour le moment cette question grave et sérieuse, je me bornerai à rappeler ici une comparaison bien simple d’un écrivain ancien : c’est que, si un généreux coursier prend de mauvaises habitudes, on le conduit au manége pour le confier au maître ; ce n’est donc pas aux ignobles valets du maître, encore moins aux loups dévorans qu’on l’envoie. Si un peuple issu de la plus noble race humaine, un peuple ancien, chrétien et doué de grandes facultés, a subi un long esclavage et des malheurs de toute espèce ; si ce peuple affaibli, par ses revers, est déchu de son antique civilisation et de son ancienne prospé-