Page:Revue des Deux Mondes - 1830 - tome 4.djvu/380

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
366
HISTOIRE. — PHILOSOPHIE.

guerre qui se ferait de l’autre côté de l’isthme ; que si, dans cette guerre, les Grecs éprouvaient des revers, comme on devait s’y attendre, si les populations étaient les nouvelles victimes de la vengeance des Turcs, si le sang coulait, les Français, qui étaient déjà engagés dans cette querelle, ne pouvaient manquer d’y prendre part, et que le principe qui les avait conduits en Morée les entraînerait forcément en Roumélie, peut-être même les conduirait jusqu’à Candie. Ce raisonnement était bien naturel, et il a acquis une nouvelle force, quand les trois ambassadeurs sont venus à Poros, et y ont passé quatre mois entiers à faire de la statistique, à discuter, ruisseau par ruisseau, les limites de la Grèce ; quand l’ambassadeur de France, qui s’attachait surtout à la partie militaire de la question, a appuyé avec instance sur la nécessité de faire une frontière militaire qui embrassât en même temps une étendue de territoire plus vaste que ne l’était la Morée, tranchant ainsi la question qui était encore indécise alors, celle de l’indépendance absolue de la Grèce et sa constitution en état indépendant. Mais lorsque le président a reçu du cabinet français lui-même le conseil secret de profiter de notre présence en Morée, pour s’étendre au delà et faire des conquêtes auxquelles notre neutralité nous empêchait de concourir ostensiblement, n’a-t-il pas dû se croire autorisé à essayer cette expédition que nous blâmions peut-être en public, pour mieux l’encourager en secret ?