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LITTÉRATURE.

vaient dérouler les pages de l’avenir en exhumant les enseignemens du passé.

Mais bientôt elle releva sa royale et majestueuse figure, et dit :

— En appelant l’attention de tous les bourgeois sur les abus de l’Église romaine, Luther et Calvin faisaient naître en Europe un esprit d’investigation qui devait amener les peuples à vouloir tout examiner. Or l’examen conduit au doute. Au lieu d’une foi nécessaire aux sociétés, ils traînaient après eux et dans le lointain une curiosité philosophique. La science s’élançait toute brillante de clartés du sein de l’hérésie. Il s’agissait bien moins d’une réforme dans l’Église que de la liberté. J’ai vu cela !…

La conséquence des succès obtenus par les religionnaires dans leur lutte contre le sacerdoce, déjà plus armé et plus redoutable que la royauté, était la ruine du pouvoir monarchique et féodal. Il ne s’agissait de rien moins que de l’anéantissement de ces trois grandes institutions, sur les débris desquelles toutes les bourgeoisies du monde auraient pactisé. Cette lutte était donc une guerre à mort entre de nouvelles combinaisons et les lois, et les croyances anciennes. Les catholiques étaient l’expression des intérêts matériels de la royauté, des seigneurs et du clergé. Ce fut un duel à outrance entre deux géans, et la Saint-Barthélemi n’en fut malheureusement qu’une blessure. Souvenez-vous que pour épargner quelques gouttes de sang dans un moment opportun, on en laisse verser plus tard par torrens. L’intelligence qui plane sur une nation ne peut éviter un malheur : celui de n’être plus jugée que par ses pairs quand elle a succombé sous le poids d’un événement. Si mon nom est en exécration à la France, il faut s’en prendre aux esprits médiocres qui y forment la majorité de toutes les générations. Dans les grandes crises que j’ai eu à subir, régner… ce n’était pas donner des audiences, passer des revues et signer des ordonnances… J’ai pu commettre des fautes, je n’étais qu’une femme. Mais pourquoi ne s’est-il pas alors rencontré un