Page:Revue des Deux Mondes - 1830 - tome 4.djvu/433

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
419
MORT DE HALLET-EFFENDI.

sure, en effet, qu’il avait dépensé plus d’un million de piastres pour l’embellissement du Tekïé (couvent chef d’ordre) d’Iconium.

Cependant Halet-Effendi y avait fait son entrée deux heures avant Arif-Aga, monté sur un cheval richement couvert, environné d’une foule de derviches et de partisans, et portant, au lieu du caouk (turban des effendis), le bonnet de Mewlèwi, qu’il s’était fait envoyer par le Cheïkh. Il se rendit directement au couvent où est enterré le fondateur de l’ordre des Mewlèwis ; il alla visiter son tombeau, y fit sa prière, et se retira ensuite au Tekïé, où il entra en conversation avec le Cheïkh.

Pendant ce temps, Arif-Aga, arrivé secrètement à Iconium, concertait avec le gouverneur, le cadi et Galib-Pacha[1], le moyen d’exécuter sa commission. Quand tout fut prêt, on fit prier Halet-Effendi de venir fumer une pipe et prendre une tasse de café. On avait caché Arif-Aga dans une armoire de l’appartement où Halet devait être reçu. On lui fit l’accueil le plus distingué, et on lui adressa des consolations et des condoléances sur sa disgrâce. Dès que les cérémonies d’usage furent accomplies, sous prétexte de causer avec plus d’abandon et sans témoins, on fit retirer par un signe les gens de la maison et ceux de Halet-Effendi, qui jusqu’alors avaient assisté à la conversation ; et peu d’instans après, Arif-Aga sortit précipitamment de l’armoire, et se plaça au milieu de l’appartement, en disant qu’il avait des ordres de Sa Hautesse contre Halet. Celui-ci objecta qu’il était possesseur d’un khatti-chèrif qui mettait sa tête à l’abri de tout danger, et par lequel le Grand-Seigneur lui garantissait la vie. « Ce

  1. Galib-Pacha, venu en France en 1802, sous le nom de Galib-Effendi, et signataire du traité de Paris de messidor an 10. C’était un homme d’état d’un haut mérite, ancien ennemi de Halet-Effendi, qui l’avait fait nommer quelques années auparavant pacha en Asie, pour le tenir éloigné de la capitale, où il craignait son influence. Galib-Pacha avait été exilé, en mai 1821, à Iconium, après la chute de Benderli-Ali-Pacha, dont le ministère fut si court.