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ALBUM.

plus belles ont pitié de toute chute, excepté de celle de leurs pareilles. Tout malheur peut réclamer d’elles une larme, hormis la honte d’une sœur égarée. »

Il se fût repenti s’il eût vu comme moi ces belles personnes étendre leur aile sur la sœur frappée à leurs pieds.

Y…

P. S. Parlerai-je maintenant du Théâtre-Français ? Abandonné par ses principaux appuis, il lutte, sinon par le talent, du moins par le nombre : jamais il n’y a eu plus d’activité à ce théâtre. On a fait, dit-on, un appel à messieurs les auteurs du second ordre ; puis sont arrivés M. Régnier-Destourbet avec sa Charlotte Corday, qui s’est traînée jusqu’à sa dixième représentation ; MM. Mailland et Blanchard avec Camille Desmoulins, et M. Casimir Bonjour, enfoui depuis un an dans les cartons. L’Épreuve électorale de ce dernier n’est guère qu’un long article de journal, flanqué d’une vieille marquise à préjugés nobiliaires, type usé qui court depuis vingt ans sur tous les théâtres. Nous avons entendu caractériser en très-peu de mots la manière de M. Bonjour : C’est un auteur qui arrange, rhabille, butine à droite et à gauche, mais ne crée pas, disait-on à côté de nous. — Il y a cependant dans cette comédie, comme dans tout ce qu’a fait M. Bonjour, des saillies heureuses, des mots piquans, qui révèlent un certain esprit d’observation. — Cela est vrai, monsieur, mais cet esprit est chose si commune en France !

Quant à Camille Desmoulins, il est au drame ce que le peintre d’enseigne est à Gros ou Girodet. C’est le Moniteur trié, découpé, et quelquefois assez maladroitement ; le colosse Danton est là tout petit, tout grêle. Mais on doit avouer qu’il y a un peu plus de sens commun dans la manière dont les auteurs ont représenté Robespierre : il n’est plus ici tout-à-fait un monstre altéré de sang ; et quoiqu’ils aient reculé devant une peinture franche du caractère de cet homme ex-