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LA NOUVELLE-ÉCOSSE.

l’existence même de ce peuple comme incompatible avec leur propre sécurité ; et, ne pouvant l’exterminer en masse, il fut résolu de le chasser en entier de ses foyers. Mais, comme on craignait qu’en se réfugiant dans le Canada, les malheureux Acadiens ne vinssent y ajouter aux forces du principal ennemi, on prit le parti de les transporter par petites portions dans toutes les autres provinces de la domination anglaise en Amérique, et de les distribuer de manière à ce qu’ils ne pussent plus se réunir.

Convaincus de l’impossibilité de s’emparer à la fois d’une population entière, si le projet de la déporter était connu d’avance ; ne pouvant surtout empêcher que les Acadiens ne se dispersassent et ne se missent à l’abri de toute recherche dans le fond des forêts, où les Indiens qui leur étaient dévoués, leur auraient porté secours, les Anglais s’occupèrent des moyens de réunir leurs victimes, et de s’en emparer par stratagème. On résolut donc d’envoyer à chaque établissement une proclamation ordonnant au peuple de se rassembler à jour fixe dans un certain endroit ; mais on eut soin que la rédaction en fût assez obscure pour qu’il ne pût deviner le véritable but de la convocation.

Cette proclamation était ainsi conçue :

« Aux habitans des districts de Grand-Pré, Minas, Rivière Canard, vieillards, jeunes hommes et garçons.

« Son Excellence nous ayant instruit des dernières résolutions de Sa Majesté à l’égard des Acadiens, et désirant que chacun soit pleinement satisfait, nous ordonne de les leur communiquer telles qu’il les a reçues lui-même. Il enjoint donc strictement par ces présentes à tous les habitans des districts ci-dessus nommés, de se réunir à l’église de Grand-Pré le ven-