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HISTOIRE. — PHILOSOPHIE.

elle que la forme, l’enveloppe d’une autre histoire intellectuelle, idéale.

Les grandes révolutions politiques et religieuses en témoignent d’une manière éclatante.

En effet, les grandes révolutions ne sont que la transition plus ou moins rapide pour un peuple d’une forme sociale ou religieuse à une autre forme plus ou moins éloignée de la première. Elles arrivent seulement lorsqu’une nouvelle idée, entrée dans l’intelligence de ce peuple, demande à se réaliser dans le monde extérieur.

Ainsi, lorsque le principe de l’autorité eut grandi dans le monde sans obstacle, et fut parvenu, pour dernier terme de son développement, à l’organisation politique et religieuse de l’Europe du xvie siècle de la chrétienté, comme disaient nos pères, alors surgit le principe de liberté.

Dans la sphère des croyances, il arriva rapidement jusqu’à ses dernières conséquences, il toucha à la démocratie religieuse ; dans la sphère politique, à diverses époques, en Angleterre et en France, il arriva de même à la république.

Mais dans le monde politique, ni dans le monde religieux, il ne pouvait s’établir pour long-temps dans la démocratie.

En effet, si les révolutions du monde réel ne sont que la reproduction des révolutions de l’intelligence, il ne leur faut pas moins des années, des siècles, pour les reproduire. La nature des choses le veut ainsi, car si la pensée est instantanée, l’acte qui la réalise ne l’est jamais. D’ailleurs c’est surtout dans le vaste mécanisme social qu’il faut tenir compte des frottemens ; les passions et les intérêts y sont des obstacles sans cesse renaissans.