Page:Revue des Deux Mondes - 1831 - tome 3.djvu/217

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
201
NOUVELLE-ZÉLANDE.

sins importuns, il taboue sa maison, ses champs. Désire-t-il s’assurer le monopole d’un navire européen mouillé sur son territoire, un tapou partiel en écartera tous ceux avec qui il ne veut point partager un commerce aussi lucratif. Est-il mécontent du capitaine, et a-t-il résolu de le priver de toute espèce de raffraîchissemens, un tapou absolu interdira l’accès du navire à tous les hommes de sa tribu. Au moyen de cette arme mystique et redoutable, et en ménageant adroitement son emploi, un chef peut amener ses sujets à une obéissance passive.

Il est bien entendu que les chefs et les arikis ou prêtres savent toujours se concerter ensemble pour assurer aux tapous toute leur inviolabilité. D’ailleurs les chefs sont le plus souvent arikis eux-mêmes, ou du moins les arikis tiennent de très-près aux chefs par les liens du sang ou des alliances. Ils ont donc un intérêt tout naturel à se soutenir réciproquement.

Le plus souvent ce tapou n’est qu’accidentel et temporaire. Alors certaines paroles prononcées, certaines formalités en déterminent l’action, comme elles en suspendent le pouvoir et en terminent la durée. Nous n’avons que très-peu de données à l’égard de ces cérémonies ; il est sans doute réservé aux missionnaires de lever un jour les ténèbres qui enveloppent ce sujet.

Seulement il m’a semblé que, pour détruire l’effet restrictif du tapou, le principe de la cérémonie consistait dans l’action d’attirer et de concentrer sur un sujet déterminé, comme une pierre, une patate, un morceau de bois, toute la vertu mystique étendue d’abord sur les êtres taboués ; puis à cacher cet objet dans un lieu à l’abri de tout contact de la part des hommes.