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VOYAGES.

pour en faire des hameçons. Mais il ne voulut pas ajouter foi à ce rapport, sans avoir d’abord examiné lui-même le sépulcre. S’y étant transporté, il n’y trouva plus que quelques côtes et la partie supérieure du crâne qui avait été brisée. Les os des bras et des mains, ainsi que ceux des mâchoires, avaient été mis en pièces et transformés en hameçons. Désormais sûr du fait, il marcha vers le village où demeuraient ceux qui avaient commis le sacrilége ; s’étant approché d’eux en plein jour et à portée de fusil, il leur déclara qu’il venait pour les châtier d’avoir violé le sépulcre où les os de son beau-père avaient été déposés, et d’avoir transformé ces os en hameçons. Ils reconnurent leur tort et la justice de la conduite de Shongui : alors, sans entrer dans le village, celui-ci fit feu sur eux, et tua cinq hommes, sur quoi le parti attaqué le pria de cesser le feu, alléguant que la mort de ceux qui venaient de succomber était une expiation suffisante pour l’offense commise. Shongui répondit qu’il était satisfait, et l’affaire fut ainsi terminée du consentement des deux partis.

» Shongui m’interpella pour savoir si nous ne regardions pas comme un crime grave de profaner les sépulcres des morts, et de faire de pareils outrages à leurs restes, et si ce peuple qu’il venait de châtier n’avait pas mérité par ses crimes la peine qu’il venait de lui infliger. Tout en admettant qu’il était juste de punir de pareils outrages, je répondis que j’étais fâché qu’il eût péri du monde, et que je craignais que ce qu’avait fait Shongui n’excitât ses adversaires à venger la mort de leurs amis. Shongui répliqua qu’ils n’étaient pas capables de faire la guerre contre lui, et qu’en conséquence il était tranquille. »

Les cadavres des hommes du peuple sont enterrés