Page:Revue des Deux Mondes - 1831 - tome 3.djvu/262

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
246
LITTÉRATURE.

imprévues, d’une construction singulièrement rare, et d’une symétrie compliquée. En 1816, après la seconde restauration, Victor composa, dans ses momens de loisir, une tragédie classique de circonstance sur le retour de Louis xviii, avec des noms égyptiens : elle avait pour titre Irtamène. En 1817, il en commença une autre intitulée Athélie ou les Scandinaves ; mais il n’alla qu’à la fin du troisième acte, et s’en dégoûta à mesure qu’il avançait ; son goût se fit plus vite que sa tragédie. Cette même année, il avait envoyé de sa pension, au concours de l’académie française, une pièce de vers sur les Avantages de l’étude, qui obtint une mention. Ce concours eut cela de remarquable, que MM. Lebrun, Casimir Delavigne, Saintine et Loyson y débutèrent également. La pièce du jeune poète de quinze ans se terminait par ces vers :

Moi, qui toujours fuyant les cités et les cours,
De trois lustres à peine ai vu finir le cours.

Elle parut si remarquable aux juges qu’ils ne purent croire à ces trois lustres, à ces quinze ans de l’auteur, et, pensant qu’il avait voulu surprendre par une supercherie la religion du respectable corps, ils ne lui accordèrent qu’une mention au lieu d’un prix. Tout ceci fut exposé dans le rapport prononcé en séance publique par M. Raynouard. Un des amis de Victor, qui assistait à la séance, courut à la pension Cordier avertir le quasi-lauréat, qui était en train d’une partie de barres et ne songeait plus à sa pièce. Victor prit son extrait de naissance, et l’alla porter à M. Raynouard, qui fut tout stupéfait comme d’une merveille ; mais il était trop tard pour réparer la méprise. M. François de Neufchâteau, qui avait été aussi dans son temps un enfant précoce, adressa à Victor Hugo des vers de félicitation et de confraternité. On y lisait, entre autres choses :