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VOYAGES.

les étrangers qui lui rendaient visite. En plein air, sous les larges branches de leur arbre favori, le fifau (callophyllum inophyllum), se tenait sa majesté, accroupie sur la terre, et environnée d’une foule de ses sujets. Il n’y avait rien là qui sentît l’étiquette ou la pompe des cours. Il y eut aussi beaucoup de simplicité dans notre présentation. Un des indigènes qui nous avait accompagnés depuis notre débarquement dans l’île, nous dit avec un accent passablement anglais, et en faisant un signe indicateur de la main : « Voilà le roi. »

Comme notre langue était tout-à-fait étrangère à sa majesté, un de ses serviteurs, qui la parlait avec beaucoup de facilité, se chargea du rôle d’interprète. Après avoir répondu à quelques questions d’usage, telles que celles-ci : « D’où vient votre vaisseau ? Où va-t-il ? De quelles provisions a-t-il besoin ? » nous nous rendîmes à l’habitation du roi, qui ne différait en aucune façon de celle des autres indigènes. Les ignames, les fruits à pain, et les poissons enveloppés de feuilles de plantain, dans lesquelles on les avait fait cuire, furent étalés devant nous. Nous avions des feuilles de ce même arbre pour assiettes, et de l’eau de coco pour boisson. Mais avant que nous eussions eu le temps de faire honneur à cette chère royale, nous fumes entourés d’une foule d’indigènes qui nous semblaient d’autant plus incommodes que la chaleur était extrême. On croira facilement que nous nous estimâmes heureux de mettre un terme à l’entrevue en opérant notre retraite.

Les chefs sont appelés successivement à la royauté, et cette haute charge n’est exercée par le même individu que pendant six mois. Cependant il arrive quelquefois qu’un chef gouverne pendant deux ou trois ans,