Page:Revue des Deux Mondes - 1831 - tome 3.djvu/347

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
327
RÉVOLUTION POLONAISE.

la frayeur ; il ne songea pas un instant à faire front à l’orage. Ainsi, lâche dans toutes les grandes circonstances, il fut lâche encore dans cette dernière action de sa cruelle existence.

Désolés de sa fuite, les patriotes s’élancèrent vers la ville pour secourir leurs camarades, engagés dans une action décisive. Deux cents étudians y luttaient en héros contre un régiment de cuirassiers de la garde impériale. À peine entrés dans la ville, les porte-enseignes à cheval se répandirent de tous côtés en criant : Aux armes !

À une heure convenue, le 4e régiment de ligne, une batterie de la garde à cheval de douze canons, une partie des grenadiers de la garde polonaise, le bataillon de sapeurs, et des compagnies de grenadiers de tous les régimens en garnison à Varsovie, sortirent de leurs casernes ; les uns se dirigèrent sur l’arsenal, les autres surveillèrent les mouvemens des gardes russes appelées de Wolhynie et de Lithuanie. Les portes de la banque nationale furent enfoncées, et deux maisons dans le quartier Novolipié incendiées, mais sans danger pour la capitale. Des mesures énergiques furent prises immédiatement pour le maintien de la tranquillité publique.

Un détachement d’étudians et de porte-enseignes, arrivé de Lazienki, fut rejoint, dans la rue du Miel ou de Napoléon, par les élèves de l’école de droit et une partie du détachement des porte-enseignes à cheval. Les prisonniers d’état délivrés, on dirigea une attaque vigoureuse contre l’arsenal, et quarante mille fusils et autant de sabres armèrent les bras des défenseurs de la patrie. Dès-lors la cause nationale fut gagnée, et une insurrection devint une révolution.

Après les premiers coups de fusil, les officiers supérieurs connus par leur aveugle obéissance à la Russie montèrent à cheval, tantôt s’efforçant d’apaiser l’armée et le peuple, tantôt les menaçant de toute la rigueur des lois militaires. Ils reçurent enfin le prix de quinze ans de trahison et de cruauté. Les généraux Hauké[1], Trembicki, Siemont-

  1. Tandis que le général Hauké, transfuge polonais, mourait dans