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ÉPOPÉE DES BOHÊMES.

tour de la figure et des compagnons d’Attila. L’époque du poème est l’invasion de Batu, fils de Tschutschi, sur le Volga, avec cinq cent mille Mongols. Les Russes, épuisés déjà par les Livoniens, sont vaincus et deviennent tributaires. Le palatin de Hongrie est renversé en 1241, et s’enfuit à toute bride. C’était le moment où la discorde des Guelfes et des Gibelins affaiblissait le plus l’Occident. La Bohème, avec son roi Wenzel, sauva l’Europe. Dans ce poème, la tradition populaire produit un effet d’art d’une extrême beauté. L’arrivée des hordes mongoles est précédée par le voyage d’une jeune fille d’un Khan, belle comme la lune elle-même ; elle a appris qu’il y a un pays vers le soir et elle est venue le visiter. C’est elle qui sera cause de la guerre, comme Hélène. Mais le repos et l’innocence de ce début contrastent d’une manière admirable avec les massacres qui vont suivre, quand le vainqueur apportera avec lui, sur sa selle, la peau de son ennemi. La jeune fille est tuée sur le chemin. Le Khan appelle à lui ses hommes ; il consulte les bâtons brisés des magiciens ; il marche contre l’Occident ; Kief et Novogorod sont en son pouvoir ; tout succombe devant lui ; une dernière bataille s’engage sous Olmütz.

« Malheur ! un bruit s’élève, un effroyable gémissement. Malheur ! déjà les chrétiens sont en fuite ; après eux les Tartares accourent avec des cris sauvages.

» Ah ! Jaroslaw s’élance, l’aigle ! Un rude acier entoure la poitrine du fort ; sous l’acier bondissent l’héroïsme et la valeur, sous le casque étincelle l’œil ardent du chef ; l’héroïsme étincelle dans son regard de feu. Dévoré de fureur, comme le lion irrité quand il voit le sang chaud nouvellement versé, quand, blessé d’une flèche, il bondit sur le chasseur, ainsi il bondit sur les Tartares.

» Après lui les Bohémiens comme une nuée de grêle. Il s’élance avec rage sur le fils de Kublay, un terrible combat commence. Ils bondissent avec leurs épées l’un sur l’autre. Toutes deux se brisent en éclat. Jaroslaw, sur son cheval baigné dans le sang, fouille avec son épée le fils de Kublay,