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RÉVOLUTION POLONAISE.

Le 11 janvier, le lieutenant-colonel Dobrzanski jeta l’alerte parmi les artilleurs et les sapeurs qui se trouvaient alors dans la capitale : il donna ordre, de la part du dictateur, au général d’artillerie Bontems de prendre toutes les précautions nécessaires contre un coup de main, de distribuer des cartouches à l’armée, car, disait-il, une insurrection devait éclater dans la journée. Vers le soir, il déposa entre les mains de Chlopicki un acte d’accusation contre Lelewel, Xavier Bronikowski, et contre le journaliste Boleslas Ostrowski, tous soupçonnés du crime de haute trahison. Il invoquait le témoignage de François Grzymala, homme de lettres ; des officiers Nieszkocin, Wiorogorski, et du comte Stanislas Rzewuski.

Lelewel, instruit de tout, souriait de pitié. — Pourquoi, lui demanda au conseil suprême le comte Gustave Malachowski, pourquoi a-t-on doublé les sentinelles ? — C’est sans doute par l’ordre du dictateur, répondit Lelewel, car on m’a dit qu’une terrible insurrection devait éclater aujourd’hui même. — Si Lelewel en est instruit, reprit le comte, nous pouvons être tranquilles.

Cette prétendue conspiration, qui a fait tant de bruit en Europe, n’était qu’une intrigue de coterie. Nous n’en aurions même pas parlé, si le juste-milieu n’avait cherché à en tirer parti.

Lelewel se rendit auprès du dictateur : — « On m’a dit que vous désiriez me voir. — Oui ; mais si vous avez quelque chose à me dire, parlez en présence de ces messieurs, répondit Chlopicki, montrant les généraux dont il était entouré, car nous ne pouvons plus parler seuls. — Il paraît qu’on a inspiré au dictateur d’étranges soupçons contre moi. — J’ai dans les mains une accusation en forme contre vous, et je vous déclare que vous êtes arrêté. — Si telle est la volonté du dictateur, je m’y soumets. » La conversation roula ensuite sur divers sujets. — « Les clubs, ajouta Lelewel, qui déplaisent tant au dictateur, et dont l’un m’a nommé son président, sont d’une haute utilité en révolution ; n’eussent-ils