Page:Revue des Deux Mondes - 1831 - tome 3.djvu/495

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
471
SAYNÈTE.

Dona Maria.

Quoi ! ils vont vous massacrer !… Il n’est plus d’espoir…

Don Félix.

Moi ! qu’importe une mort ou une autre !… Mais vous… vous, dona Maria… qu’allez-vous devenir ?… Ils vont vous tuer avec moi, tuer la colombe trouvée dans un nid de vautour… Oh ! pourquoi m’êtes-vous venue trouver ! Ne saviez-vous pas qu’il y avait toujours un abîme sous mes pieds ?… On y tombe en m’approchant… Ah ! ce poison…

Dona Maria.

Ne peut faire son effet que dans une heure ; c’est une souffrance de plus qui ne nous sauve pas…

(Les cris redoublent.)
Don Félix.

Mon Dieu, mon Dieu, que devenir ! Un refuge pour vous, fût-ce mon tombeau !… Mais les cris cessent, je crois…

Le geôlier.

Vous êtes sauvé !… Des gardes du roi conduits par votre mère viennent de dissiper le peuple, à qui on a promis satisfaction…

(Entre la comtesse.)
La Comtesse, lui tendant les bras.

Mon fils !… mon cher fils !…

Don Félix.

Ma mère… Ai-je le droit de vous embrasser ?…

La Comtesse.

Viens toujours, coupable ou non… Une mère ne méconnaît jamais son fils, même couvert de sang… Tu es un meurtrier, il est vrai ; mais tu n’es point un parricide…

Don Félix.

Comment !…

La Comtesse.

Je vais rougir devant mon fils ; mais n’importe… Ton père n’était point le comte ; c’était don Alphonse de Ribeyro… que le comte a assassiné dans mes bras… Tu es le fils d’un adultère.