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LITTÉRATURE.

— Blanche était suffoquée par les larmes ; mais il y avait dans ses yeux mille promesses plus tendres que celles que Marceau exigeait. D’une main, elle serrait celle de Marceau, qui était à ses pieds, et de l’autre elle lui montrait la rose rouge, dont sa tête était parée. — Toujours, toujours, balbutia-t-elle, et elle tomba évanouie.

Les cris de Marceau attirèrent sa mère et ses sœurs. Il croyait Blanche morte ; il se roulait à ses pieds. Tout s’exagère en amour, craintes et espérances. Le soldat n’était qu’un enfant.

Blanche rouvrit les yeux, et rougit en voyant Marceau à ses pieds, et sa famille autour de lui. — Il part, dit-elle, pour se battre contre mon père peut-être. Oh ! épargnez mon père ; si mon père tombe entre vos mains, songez que sa mort me tuerait. — Que voulez-vous de plus, ajouta-t-elle en baissant la voix ; je n’ai pensé à mon père qu’après avoir pensé à vous. Puis, rappelant aussitôt son courage, elle supplia Marceau de partir ; lui-même en comprenait la nécessité, aussi ne résista-t-il pas davantage à ses prières et à celles de sa mère. Les ordres nécessaires à son départ furent donnés, et une heure après il avait reçu les adieux de Blanche et de sa famille.

Marceau suivait, pour quitter Blanche, la route qu’il avait parcourue avec elle ; il avançait sans presser ni ralentir le pas de son cheval, et chaque localité lui rappelait quelques mots du récit de la jeune Vendéenne ; il repassait en quelque sorte par l’histoire qu’elle lui avait contée ; et le danger qu’elle courait, auquel il n’avait pas songé tant qu’il était près d’elle, lui paraissait bien plus grand maintenant qu’il l’avait quittée. Chaque mot de Delmar bruissait à ses oreilles : à chaque instant, il était prêt à arrêter son cheval, à retourner à Nantes ; et il lui fallut toute sa raison, pour ne pas céder au besoin de la revoir.

Si Marceau avait pu s’occuper d’autre chose que de ce qui se passait dans sa propre pensée, il aurait aperçu, à l’extrémité du chemin, et venant vers lui, un cavalier qui, après