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L’AUTRE CHAMBRE.

lissent mille gerbes de feu ! Ses deux bras enflammés tournent en sens contraire avec la rapidité des roues d’un char qui s’emporte ! jamais citadelle assiégée ne lança plus de bombes que le conseiller contre son ennemi ! jamais canons ne vomirent plus de feux que sa bouche ! chaque fois que Théodore essayait d’avancer d’un pas, le lâche, en souriant, versait sur lui une pluie de flammes !

Quel amant si jaloux n’eût été forcé de reculer ? Théodore néanmoins tint bon et persista long-temps dans ce combat inégal ; mais son intrépidité fut sans résultat, et après vingt-quatre heures d’un feu toujours nourri, après vingt-quatre heures d’efforts et d’angoisses, il eut la douleur de voir le gros conseiller, son rival, disparaître dans les airs avec la princesse au milieu d’un tourbillon de flammes et de fumée.

IX. — PROJET DE MARIAGE.

Ce n’est pas sans raison qu’autrefois les juges et les médecins portaient le même costume : il y a plus d’analogie qu’on ne le supposerait au premier abord entre la médecine et la justice. Le malade n’est-il pas un vrai coupable convaincu d’imprudence ou d’excès ? ne lui applique-t-on pas des peines proportionnées à la gravité du délit ? et de ces peines nécessaires, il faut le croire pour l’exemple, combien y en-a-t-il qui profitent au condamné ?

Convaincu des rapports incontestables qui existent entre les deux professions, j’ai souvent regretté que la médecine n’empruntât pas à la justice une des innovations les plus heureuses de l’institution du jury : je voudrais que le médecin, comme fait le juré, fût simplement appelé à prononcer sur la culpabilité, c’est-à-dire sur la cause et sur la nature de la maladie, et que l’apothicaire fût seul chargé, comme le juge, d’appliquer sa peine, car j’ai remarqué que les trois quarts des bévues commises par nos docteurs viennent de ce qu’ils ne procèdent pas catégoriquement, et de ce qu’ils