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australes à l’Amérique, quelques géographes, et le sage Burney à leur tête, joignaient les deux mondes au fond de la mer de Behring. Enfin, de même que les voyages de Willoughby et de Chancellor avaient isolé l’Amérique de l’Europe, ceux du baron de Wrangel et du lieutenant Anjon, en 1822, la séparèrent définitivement de l’Asie.

Au sud, des pêcheurs de phoques, et les navigateurs anglais et russes Smith, Powell[1], Bellingshausen et Weddell, se sont approchés du pôle en faisant espérer qu’on l’atteindrait un jour. Ils ont rencontré la Nouvelle-Shetland, la terre de la Trinité, le groupe de Powell, les îles Alexandre et Pierre, et celles de Traversay. Les Américains du nord ont aussi parcouru ces mers glaciales dont les rochers stériles offraient de précieuses fourrures ; leur ardeur n’a pas connu d’obstacles, leurs voyages se sont multipliés sans relâche : ils ont acquis sur ces régions les connaissances les plus étendues ; mais l’intérêt mercantile a commandé le silence, et, loin d’envier la gloire de publier leurs succès, souvent ils ont fait serment de les taire.

La distance qui sépare l’Europe de l’Amérique fut d’abord mal appréciée ; l’époque n’est pas encore éloignée où il fallut diminuer de soixante, et même de cent quarante lieues sur quelques points, la largeur de l’Atlantique, tandis qu’au contraire les cartes des côtes opposées envahissaient plusieurs degrés du grand Océan. Les premiers navigateurs remplirent une assez belle tâche en faisant connaître seulement les rivages de l’Amérique ; mais ils ne purent pas donner à leurs travaux une grande exactitude, et ils ne tracèrent, à proprement parler, qu’un cadre immense, dont les divers détails furent successivement remplis, lorsque les peuples rivaux profitèrent de leurs découvertes. Dans l’hémisphère méridional, les Espagnols et les Portugais fournirent la partie la plus importante de ce travail ; mais d’autres nations acquirent toutefois, dans certaines localités, des connaissances plus complètes que les conquérans et les possesseurs du pays. Ainsi, les Normands de la France pilotèrent sou-

  1. Voyez sur Powell une Notice publiée dans notre numéro de janvier 1831.