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HONESTUS.

vicieux ! Je te le disais bien, toi si honnête et si bon, te voilà devenu d’un seul coup assassin, parricide et voleur !

Gustave, hors de lui, se jeta aux genoux du magicien, car j’imagine que c’en était un. — Ô mon père, dit-il, oh ! quelle peur vous m’avez faite, mon père ! Oui assassin, oui parricide, oui voleur ! Moi gentilhomme ! C’est la faute du vice, mon père ! Et il pleurait ce bon jeune homme ! Il pleurait, poussant du pied les bouteilles vides. Le vieillard se prit à le consoler.

— Console toi, Gustave, tu es honnête et bon. Tu as soulagé ma misère, ce soir, en me sacrifiant un plaisir innocent, je suis resté ton obligé. Regarde, ma blessure n’est pas mortelle. Vois mon sein, il est fermé ; mon cœur bat plus calme que le tien. Minuit va venir. Profite donc de cette heure et de la lune nouvelle pour me demander une grâce que je ne te puis refuser ! Parle !

— Je ne veux rien, dit Gustave, que votre pardon, mon père !

— Veux-tu mon diamant ? dit le vieillard.

— Ton diamant ! dit Gustave reculant d’horreur ! Non, non ! La fortune souille, le pouvoir souille, tout cela vous souille jusqu’à l’os, et je sais combien il en coûte pour se laver les mains. Je ne veux rien pour moi !

— Et ne veux-tu rien pour les autres ? dit Honestus.

Gustave réfléchit profondément. — Il est une chose que je veux pour les autres et pour moi, dit-il.

— Laquelle ? reprit Honestus déjà inquiet.

Écoute ceci, reprit Gustave. Écoute ! — Que le vice disparaisse du monde ; que le crime abandonne la terre. — Que le règne de la vertu arrive enfin. Tu l’as dis, tu ne peux pas me refuser. Obéis donc ! je le veux.

Le vieillard poussa un soupir.

— Répète ton vœu à haute voix, dit-il.

Gustave répéta son vœu à haute voix.

En même temps, on entendit sortir de dessous terre un atroce et ridicule ricanement. On eût dit le ricanement d’un bourgeois