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MARCO POLO.

lui les trois voyageurs, substitua aux premières instructions qu’il leur avait données, des lettres papales, écrites selon l’usage que sa nouvelle dignité lui faisait un devoir de suivre. Il leur donna ensuite sa bénédiction et leur confia deux frères prêcheurs, chargés de remettre de riches présens, de la part du pape, au grand Kan des Tartares.

Ces arrangemens et le départ de la famille eurent lieu vers la fin de l’an 1271. Alors la partie septentrionale de la Syrie avait été envahie par le soudan d’Égypte, et l’alarme que causait son approche vers les frontières de la basse Arménie était telle, que les deux frères prêcheurs, commissionnés par le nouveau pape, n’osèrent pas s’y enfoncer et retournèrent prudemment à la côte.

Quant à la famille Polo, sans être arrêtée par l’idée des dangers qu’ils pouvaient courir, ils poursuivirent leur voyage vers l’intérieur de l’Asie, en suivant la direction du nord-est. D’après la relation, il paraît qu’ils n’eurent à surmonter que des difficultés dont les causes étaient naturelles, car rien n’indique qu’ils aient jamais été arrêtés hostilement dans le cours de leur long voyage.

Ils traversèrent la Haute-Arménie, une partie de la Perse, le Khorassan, et arrivèrent dans le pays de Badaksan au milieu des sources de l’Oxus, où ils s’arrêtèrent un an.

Dans ces contrées, alors, comme il arrive aujourd’hui même encore, on ne voyageait qu’avec de grandes difficultés et beaucoup de lenteur. Les conquêtes des Tartares avaient détruit beaucoup de villes, et celles qui restaient étaient souvent à de grandes distances l’une de l’autre. Outre ces inconvéniens, la route que l’on voulait suivre était coupée par des fleuves, des marais, des montagnes et des déserts. Il fallait souvent attendre qu’un assez grand nombre de voyageurs, tendant vers le même but, fussent rassemblés pour former une caravane qui pût surmonter les obstacles qu’offriraient les lieux, et se défendre en cas d’attaque. Peut-être est-ce par des causes de cette nature, jointes aux opérations commerciales que les Polo faisaient en route, que l’on peut expliquer le séjour d’un an qu’ils firent près des sources de l’Oxus. Toutefois il paraît, d’après un pas-