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REVUE DES DEUX MONDES.

— C’est mon nom.

— J’aurais dû le deviner au doux éclat de vos beaux yeux. Madame, disposez en tout de votre esclave, mon palais vous appartient. Je n’ai qu’une condition à mettre à mon marché, mais une condition à laquelle je tiens plus qu’à toute autre chose au monde. Qui voudra posséder mon palais, doit jurer de remplir fidèlement l’engagement que j’exigerai de lui à ce sujet. Dites à votre mari, madame, que je l’attends pour passer le contrat.

À peine la belle Ildiz eût-elle repris le chemin de Baghdad, accompagnée de ses serviteurs et de ses esclaves, que Zahed se retira tout soucieux dans sa chambre. Ce jour-là ne fut marqué par aucune fête. Les visiteurs et les convives reçurent contre-ordre ; pas une lumière ne brilla pendant la nuit aux fenêtres du palais de Zahed ; pas une esclave n’obtint l’honneur de partager la couche de son maître. Zahed méditait quelque projet sinistre ; la beauté de cette femme avait réveillé l’envie au fond de son ame. Dès lors il n’avait d’amour que pour la femme de Hamdoun, de son ancien complice dans le meurtre du vieux Ali-Ahmed. Maintenant il lui enviait sa femme après lui avoir envié ses richesses. Il avait résolu, même au prix de ces trésors qu’il avait tant souhaités, même au prix de son sang, de posséder Ildiz, maintenant la seule pensée de son ame, le seul but de sa vie.

Hamdoun ne fit pas attendre sa visite à Mohammed-Ildérim-Tchélébi. Pendant la conférence des deux effendis, la belle Ildiz, accompagnée de ses femmes et de quelques amies, se promenait dans les jardins du palais, et visitait les merveilles de cette délicieuse habitation. Bientôt Hamdoun vint rejoindre sa femme les yeux rayonnans de joie, et il lui annonça que le contrat de vente était passé par devant un cadi, et que désormais ce palais tant souhaité leur appartenait. Ildiz voulut connaître la condition que le vendeur avait fait stipuler dans le contrat.

— C’est un enfantillage, dit Hamdoun, une bizarrerie à laquelle il m’a fallu consentir sous peine d’un refus positif. Vous savez, m’a dit cet homme, que chacun a sa folie dans ce monde. C’est à mon grand regret que je me défais de cette habitation charmante que j’ai bâtie et plantée moi-même, je ne consentirai jamais à me considérer comme entièrement dépossédé de ce châ-