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LE CLOU DE ZAHED.

teau. J’exige, comme clause essentielle du contrat, qu’il y soit stipulé que je conserve dans ce palais un clou, la place d’un clou, c’est bien peu de chose n’est-ce pas ? mais je veux que cet espace, si étroit qu’il puisse être, m’appartienne dans votre palais. Je n’ai pu, tu penses bien, ma chère Ildiz, lui refuser cette légère satisfaction, qui m’était d’ailleurs imposée comme une condition du contrat. J’ai signé.

— Mon ami, dit Ildiz en passant amoureusement ses bras autour du cou de Hamdoun, pourquoi avez-vous consenti à cette clause ? Dieu veuille que nous n’ayons pas à nous en repentir !

Comme ils rentraient dans le palais, les deux époux virent quatre esclaves hisser à grande peine une longue boîte de plomb sur le dos d’un dromadaire. Mohammed-Effendi, monté sur un magnifique cheval richement caparaçonné, examinait leur travail avec une attention particulière ; Hamdoun s’approche de lui, et lui dit :

— En prenant possession de ce palais, il est naturel que j’en connaisse toutes les parties. Des gens de Baghdad m’ont assuré qu’il y avait autrefois un puits célèbre par son antiquité sur l’emplacement qu’occupe aujourd’hui le magnifique palais que vous avez fait élever. Veuillez, seigneur, me montrer ce puits, si vous l’avez conservé.

À ces mots, le visage triste et sévère de Zahed sembla rayonner d’une joie infernale.

— J’ai fait combler ce puits, répondit-il.

— Et ne l’avez-vous point fouillé ? N’avez-vous point fait remuer les décombres ?

— Dans quel but ? et qu’aurais-je pu y trouver ? Quelque vautour desséché ? Quelque cadavre sans nom, que des assassins y auraient jeté pour ensevelir leur crime et la vengeance des lois ?

— Des ossemens ! un cadavre ! répéta Hamdoun, qui pâlit et recula d’effroi.

— Qu’avez-vous, Hamdoun-Effendi ? interrompit Zahed. Il faut que vous soyez un homme bien vertueux, pour qu’un seul mot vous trouble ainsi et vous mette en émoi. Rassurez-vous, on n’a rien retiré de ce puits, car je l’ai fait combler de pierres sans permettre que mes esclaves portassent leurs regards indiscrets dans les en-