Page:Revue des Deux Mondes - 1832 - tome 8.djvu/433

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
427
GEOFFROI ET BRUNISSENDE.

vrage dont il s’agit est à tous égards pitoyable, au point qu’il n’y a guère moyen de l’attribuer à un poète de profession, si mauvais qu’on le suppose. En 1240, époque vers laquelle fut écrit ce poème, l’épopée provençale était déjà sans doute fort déchue de sa forme et de sa grâce premières ; mais on peut s’assurer qu’elle ne l’était pas au degré que marquerait le roman en question, si l’on voulait en conclure quelque chose relativement à l’état général de la poésie provençale à cette époque. Un pareil ouvrage n’était certainement qu’une témérité d’enfant ou d’écolier, essayant de faire de la poésie sans la moindre lueur de vocation poétique. Le plus grand mérite de cet ouvrage est d’être fort court, et le résumé n’en sera pas long.

Blandin de Cornouailles et Guilhaume ou Guilhot de Miramas sont deux vaillans chevaliers de la Table ronde fort liés d’amitié, et qui vont ensemble en quête d’aventures. Réunis ou séparés, ils en mènent bravement plusieurs à fin ; ils tuent des géans, délivrent des demoiselles, couchent dans les forêts, chez des ermites, et finissent par trouver un oiseau qui leur chante en langue humaine et leur indique de belles aventures, qu’ils se mettent aussitôt à chercher. La plus merveilleuse de toutes, celle qui couronne les autres, est réservée à Blandin, le véritable héros du poème. Il délivre par trois exploits miraculeux la princesse Briande du sommeil auquel elle était condamnée par je ne sais quel malin enchantement. À peine est-elle éveillée et a-t-elle vu son libérateur, qu’elle en devient éperdument amoureuse, lui inspire un égal amour, l’épouse, et donne Yrlande, sa sœur, pour femme au compagnon de Blandin.

Des aventures de ce genre peuvent intéresser par la grâce et le charme des accessoires et des détails : ici, tout est de la même fadeur et de la même platitude, tout absolument, la diction, les détails, les accessoires et le fond ; et je ne me figure pas d’homme à qui tout cela ait pu plaire, si ce n’est le jeune Richard de Cornouailles, en supposant, bien entendu, comme je l’ai fait, que le poème fût composé en son honneur par une aimable et belle princesse, destinée à devenir reine.

Un second roman provençal de la Table ronde, dont le texte