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mon passeport était daté du mois de juin précédent, et pareille chose m’est arrivée plusieurs fois. Il faudrait d’ailleurs voir le passeport de Loanda, où se trouve mentionné le dépôt de celui de Rio-Janeiro, pour juger si le tout est bien en règle.

3o Quant aux 45,000 fr. (M. Douville a dit dans le Messager 9,000 piastres, ce qui est plus exact et très-important) que possédait en avril 1828, et que possède encore notre voyageur dans les fonds de la Banque de Buenos-Ayres, ceci exige une courte explication. En 1824, une banque nationale fut fondée à Buenos-Ayres, avec des attributions pareilles à celles de la Banque de France, ou à peu près ; son papier se maintint au pair, c’est-à-dire que pour 17 piastres de ce papier on obtenait couramment une quadruple ou once de 85 fr., jusqu’au mois de décembre 1825, époque où la guerre éclata entre le Brésil et la République Argentine. Le papier de la banque se ressentit de cet événement, et baissa d’une manière effrayante, lorsqu’elle commença à prêter au gouvernement, qui eut recours à elle après avoir épuisé 3 millions de piastres qu’il lui avait confiés. Cette dépréciation a toujours été en augmentant, et à l’heure qu’il est, il faut donner 120 piastres en papier pour une once. En avril 1828, il fallait en donner 75, ce qui met la valeur de la piastre à 80 centimes et les 9,000 piastres de M. Douville à 7,200 fr. Ensuite, cette somme étant placée dans les fonds publics, qui à la même époque étaient tombés à 50, elle perd encore de sa valeur suivant le taux et l’époque à laquelle M. Douville a acheté les fonds en question. La différence n’est pas petite, comme on voit, et que serait-ce si le reçu en question était soumis à des yeux expérimentés ?

Je passe maintenant aux preuves que j’ai promises de mon côté. Il existe actuellement à Paris, à ma connaissance, dix-neuf personnes qui ont connu M. Douville à Buenos-Ayres, et en cherchant mieux, on en trouverait certainement le double. En tête de ces témoins, je placerai l’honorable M. Rivadavia, qui était président de la république, lorsque notre voyageur arriva à Buenos-Ayres, et qui possède des anecdotes fort curieuses sur ce qui se passa dans les diverses audiences qu’il voulut bien lui accorder. Mon intention n’est pas de reproduire ici en entier toutes les pièces que j’ai entre les mains. Des faits sur lesquels je voudrais pouvoir jeter un voile officieux s’y trouvent relatés avec une nudité que je veux épargner à la personne qu’ils concernent, ainsi que les épithètes peu honorables qui se trouvent accolées à son nom. Je me contente, en conséquence, de déposer dans les bureaux de la Revue des Deux Mondes, à la disposition de toutes les personnes qui voudront en prendre connaissance, les pièces suivantes :

1o Dix numéros de la Cronica politica y literaria de Buenos-Ayres, du 26 mars au 19 juin 1827, contenant des annonces commerciales de Douville et Laboissière, et l’article que ce journal publia en réponse à la Gaceta mercantil, au sujet de la contrefaçon des billets de la banque nationale.

2o Une lettre signée de cinq des témoins dont j’ai parlé plus haut et dont j’extrais les passages suivans :


Paris, 5 novembre 1832.
M. Théodore Lacordaire,

Monsieur, nous avons lu, dans la Revue des Deux Mondes du premier de ce mois, l’article que vous y avez inséré sur M. Douville. Le