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REVUE DES DEUX MONDES.

Et chercher vaguement, à travers le lointain,
Si l’on n’aperçoit pas ton jeune Florentin.
Enfin, le souvenir de ta chère folie
Est tel, que l’astre aimé de la molle Italie,
L’astre que sa voix d’or nomme encor la Diva,
La légère Phoebé, la blonde Cynthia,
Ne peut verser les flots de sa blanche lumière,
Sans qu’il semble toujours sur les grands ponts de pierre,
Et sur les escaliers dans les ondes perdus,
Ouïr flotter ta robe et courir tes pieds nus.


Ah ! quand l’été jadis fleurissait dans les âmes,
Quand l’Amour, cet oiseau qui chante au cœur des femmes,
Sur terre s’abattait de tous les coins du ciel ;
Que le vent parfumé portait l’odeur du miel ;
Au beau règne des fleurs, quand toute créature
Maniait noblement sa divine nature,
Venise, il était doux, sous tes cieux étouffans,
D’aspirer ton air pur comme un de tes enfans ;
Il était doux de vivre aux chansons des guitares,
Car, ainsi qu’aujourd’hui, les chants n’étaient pas rares ;
Les chants suivaient partout les plaisirs sur les eaux,
Les courses à la rame, à travers les canaux,
Et les beaux jeunes gens, guidant les demoiselles
Alertes et gaîment sur les gondoles frêles.
Alors, après la table, une main dans la main,
On dansait au Lido jusques au lendemain ;
Ou bien vers la Brenta, sur de fraîches prairies,
On allait deux à deux faire ses rêveries,