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REVUE DES DEUX MONDES.

Le gouverneur et les directeurs ne furent pas moins bienveillans pour moi que mes jeunes compagnons. Il fut décidé que ma présentation au roi aurait lieu le 1er janvier suivant, jour de baisemains et de grand gala.

Mon uniforme me fut apporté la veille de ce jour, mémorable pour moi. On peut aisément s’imaginer quels furent mes transports de joie en l’essayant. Je n’ai pas éprouvé de pareil plaisir, alors même que, pour la première fois, j’ai porté l’épaulette.

L’uniforme des pages de Joseph Napoléon n’avait cependant rien de cette élégance recherchée qui distinguait les pages espagnols des rois de la dynastie autrichienne, lorsque, marchant à pied, le chapeau à la main, autour du coche royal, ou bien, assis sur les portières, ils accompagnaient à la fiesta de Toros ou à la procession de San Isidro leurs graves et magnifiques souverains. Des chausses de soie noire, un juste-au-corps de velours noir que serrait à la taille une ceinture de même couleur, un large chapeau de feutre orné d’une longue plume blanche, tel était alors leur costume simple et pittoresque. Du reste, point de manteau, point d’épée, seulement on voyait suspendue à la ceinture des plus âgés une petite dague de Tolède, à poignée d’or richement ciselée et à fourreau d’argent émaillé et orné d’arabesques.

Dans sa richesse, l’uniforme des pages de Joseph Napoléon, ainsi que celui des pages de la maison de Bourbon, ressemblait plutôt à une livrée qu’à un habit de cour.

Nous portions un frac bleu foncé, galonné en or au collet, aux paremens, aux retroussis, à la taille, et dont la poitrine était couverte de larges galons à brandebourgs d’or, pareils, sauf la couleur, à ceux des grenadiers à cheval de la garde de Charles x. Les paremens et le collet du frac étaient en velours. Des culottes bleues, serrées au genou par une boucle d’or, des bas de soie blancs à grands coins, des souliers à boucles, complétaient cet uniforme, que relevaient un peu un chapeau militaire, magnifiquement galonné et doublé de plumes blanches comme le chapeau d’un maréchal de France, une aiguillette de soie blanche, brodée d’or, attachée sur l’épaule gauche, et enfin l’épée, que nous avions au côté.

Les pages de service portaient seuls la botte à l’écuyère.