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DU VANDALISME EN FRANCE.

condamnée par arrêt du parlement à se montrer en public au moins deux fois par semaine.

L’église des Jacobins ou Dominicains, à deux nefs d’une hauteur prodigieuse, si vantée dans toutes les anciennes descriptions de Toulouse, est complètement inaccessible aujourd’hui. Elle a été octroyée à l’artillerie qui a établi une écurie dans la partie inférieure, et distribué le reste en greniers et en chambres. On ne peut juger de son ancienne forme que par l’extérieur qui est en briques, et notamment par son admirable clocher étagé, qui a été épargné jusqu’à présent, et qui est le plus beau de Toulouse. Je vous fais observer en passant qu’une sorte de fatalité toute particulière semble s’attacher aux églises construites par les Dominicains, toujours d’un goût si simple, si pur, si régulier : elles sont partout choisies en premier lieu par les destructeurs. À Avignon, la belle église de Saint-Dominique, la plus célèbre de cette ville après la cathédrale, a été aussi métamorphosée en fonderie de canon.

L’église des Augustins, le troisième des grands monumens monastiques de Toulouse, a été transformée en musée. Le cloître attenant, qui est d’un caractère excellent, avec des arcades en ogives tréflées du quatorzième siècle, doit être disposé pour recevoir le musée de sculpture, qui se compose des débris les plus précieux de tombeaux et de bas-reliefs du moyen âge. Je ne pense pas qu’il se trouve en France de collection plus originale, plus nationale. On y remarque surtout les statues tumulaires des comtes de Comminges, des évêques et archevêques de Toulouse et de Narbonne, ainsi que de délicieuses madones en pierre et en bois. Il faut espérer que ces charmans morceaux, qui gisent aujourd’hui pêle-mêle dans le cloître, y seront bientôt disposés par ordre chronologique, et surtout que l’on ne fera aucun changement, aucune addition postiche au cloître qui, dans son état actuel, est du plus grand mérite. Malheureusement, le sort de l’église, destinée à recevoir les tableaux, n’est pas fait pour rassurer ; au moins fallait-il, en lui ôtant sa destination sacrée, lui laisser sa forme primitive, qui était d’un gothique élégant et simple. Mais les barbares transformateurs en ont jugé autrement ; ils n’ont pas su comprendre tout ce qu’aurait de grandiose et de beau une pareille galerie : ils ont élevé le plancher à six pieds au-dessus de l’ancien niveau, ont substitué un plafond en plâtre à la voûte en ogive, construit une sorte de colonnade corinthienne à l’endroit du maître-autel, et, enfin, défoncé la rosace de la façade, dont les débris jonchent en ce moment la cour extérieure[1].

Le plus curieux édifice religieux de Toulouse est sans contredit l’église

  1. À propos de ces travaux, le Moniteur du 2 février disait gravement : « On