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dans Ella de Garveloch, on trouve l’indication d’une singulière habitude que prend le bétail dans certains districts maritimes où le sol est peu fertile.

Garveloch est une île qui fait partie d’un petit groupe situé sur la côte occidentale de l’Argileshire. Elle est de peu d’étendue, très montagneuse, et le sol ne pourrait nourrir qu’un très petit nombre d’individus ; mais les habitans font quelque commerce de la barille, qu’ils obtiennent en brûlant les plantes marines que les flots accumulent sur le rivage ; la plupart en outre se livrent à la pêche, et leurs animaux domestiques vivent aussi en partie de poissons.

Miss Martineau, au commencement de son livre, nous représente le propriétaire de l’île y arrivant avec quelques amis, et l’un d’eux inspectant l’unique ferme qui y existât alors, — « N’avez-vous pas, dit le gentleman, d’autres animaux que ces deux bidets mal peignés et ces trois ou quatre vaches que je vois paître dans le marais ? — Oh ! reprit le fermier, il ferait beau voir que je n’eusse pas plus de bétail ; il y a là-bas sur les grèves une bande de vaches qui pêchent. — Des vaches qui pêchent ! que voulez-vous dire par-là ? — Je veux dire ce que je dis, que les vaches sont sur les grèves à prendre dans les mares du poisson pour leur repas. » Le maître alors expliqua à son ami que tous les animaux domestiques, même les chevaux, mangent volontiers du poisson, quand leurs pâturages sont trop pauvres, et que dans cette île en particulier le bétail est accoutumé à se rendre sur la plage à la marée basse pour prendre et manger le poisson que la mer en se retirant a laissé dans les creux.

Probablement en lisant ce passage, bien des lecteurs auront souri de la crédulité de miss Martineau. Cependant le fait qu’elle rapporte est exact, il se reproduit sur une foule de points du globe, et il en est parlé dans les auteurs les plus anciens.

Dans un lac de Péonie, nous dit Élien, d’après Zénothémis, il naît certains poissons que les bœufs mangent avec autant de plaisir que les autres bœufs mangent du foin, pourvu qu’on les leur présente vivans et palpitans. Morts, ils en ont du dégoût et ne veulent pas y toucher. M. Dureau de Lamalle, qui, dans un mémoire sur la domestication des animaux, cite le passage d’Élien, ajoute que,