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MOUVEMENS MUSCULAIRES.

est le récit d’un morceau de l’Iliade qui porte Alexandre à se jeter sur ses armes.

En terminant ici l’exposition des faits qui me paraissent se lier à mes observations, je crois devoir faire une remarque, qui se trouve bien implicitement dans ce que j’ai dit, mais qui pourrait échapper à quelque lecteur : c’est que cette tendance au mouvement à laquelle je rapporte la cause première d’un grand nombre de nos actions, n’a lieu qu’autant que nous sommes dans un certain état, qui est précisément ce que les magnétiseurs appellent la foi. L’existence de cet état est parfaitement démontrée par le récit de mes expériences : effectivement, tant que j’ai cru possible le mouvement du pendule que je tenais à la main, il a eu lieu ; mais après en avoir eu découvert la cause, il ne m’a plus été possible de le reproduire. C’est parce que nous ne sommes pas toujours dans le même état, que nous ne recevons pas constamment la même impression d’une même chose : ainsi le bâillement d’un autre ne nous fait pas toujours bâiller ; le rire ne se communique pas toujours du rieur à son voisin, etc. Le grand orateur qui veut faire partager à la foule qui l’écoute la passion qui l’anime, n’arrive point de prime abord à son but ; il commence par y prédisposer son auditoire, et ce n’est qu’après s’en être rendu maître qu’il lance son dernier argument, son dernier trait. Le grand poète, le grand écrivain, usent constamment du même artifice ; ils préparent d’abord leur lecteur à recevoir une impression finale. Rien de plus curieux dans l’étude des causes qui déterminent les actions de l’homme, que la connaissance des moyens employés par le marchand pour appeler d’abord et fixer ensuite l’attention de l’acheteur sur les qualités de l’objet qu’il veut lui faire prendre ; que la connaissance des moyens employés par l’escamoteur pour faire tirer d’un jeu de cartes telle carte plutôt que toute autre, ou pour porter l’attention du spectateur sur une certaine chose, afin de la distraire d’une autre, distraction sans laquelle l’escamoteur ne causerait point la surprise qui est l’objet final de son art. Il résulte de ces considérations que les professions les plus diverses emploient des moyens tout-à-fait analogues, quoique excessivement variés, pour arriver à un même but, celui de s’emparer d’abord de l’attention de l’homme, afin de produire ensuite sur lui un effet déterminé.