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4700 fr., on devra contribuer pour une somme de 2,585 fr., plus forte que la précédente de 101 fr. Mais la fortune n’est augmentée que de 100 fr. Voilà donc 1  fr. qu’on est obligé de prendre sur ce qu’on avait acquis.

Celui qui, jouissant du même revenu de 4600 fr., voudrait devenir plus riche, verrait au contraire décroître sa fortune en telle sorte que, lorsqu’il serait arrivé à 9,200 fr., il n’aurait plus rien à lui, puisqu’il serait obligé de contribuer pour une pareille somme de 9200 fr. L’absurdité de ces résultats, qu’on peut vérifier par le calcul, prouve qu’il faut examiner de près les effets des progressions.

Les progressions sont-elles rapides, indéfiniment croissantes, appliquées à toutes les sortes de revenus ? Nous venons de voir qu’elles détachent le contribuable de sa propriété et réduisent le producteur à l’inertie. Or, l’impôt qui agirait ainsi, serait une loi agraire déguisée, puisqu’il ramènerait bientôt toutes les fortunes au même niveau. À vrai dire, il ne s’agit plus ici d’un problème d’économie politique, mais d’un nouveau régime social sans analogie avec celui qui existe.

Si l’on demande pourquoi il serait impossible d’établir des progressions sagement graduées ? nous répondrons qu’à l’exception de quelques impôts particuliers comme sur les loyers ou les successions, le seul moyen d’en avoir est de recourir aux proportions simplement géométriques, ou en d’autres termes, à l’impôt proportionnel. On pourrait bien déterminer une portion de nécessaire, exempte de contribution, soumettre la portion suivante à un impôt proportionnel, et livrer la fortune excédante à une progression indéfinie ; mais ce serait reculer, pour un plus ou moins grand nombre d’individus, le moment où le désir d’accroître son revenu n’a plus d’objet. Ce moment d’inertie arriverait d’ailleurs beaucoup plus tôt que le terme donné par le calcul. On doit tenir compte en effet, non-seulement du revenu net du contribuable, mais du passif de sa propriété, de ses dépenses personnelles, de ses frais de gestion qui s’accroissent avec le patrimoine lui-même.

Sans doute, dans le nombre infini des progressions possibles, il est facile d’en trouver dont le produit soit inférieur à celui de l’impôt proportionnel. Nous en verrons un exemple assez inattendu