Page:Revue des Deux Mondes - 1833 - tome 3.djvu/107

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
101
MÉLANGES.

rangées précisément dans l’ordre des températures où elles passent de l’état liquide à l’état gazeux.

Ce n’est pas ainsi pourtant qu’est composé le globe de la terre, et ce n’est pas ainsi que doivent l’être les planètes et les soleils répandus dans l’espace. Pour voir ce qui a dû arriver, rendons aux couches successives les propriétés chimiques dont elles sont douées, et cet ordre si régulier sera aussitôt détruit par d’immenses bouleversemens.

Lorsqu’une nouvelle couche se dépose à l’état liquide, soit que la précédente existe encore à cet état, soit que déjà elle ait passé à l’état solide, il doit se manifester entre elles une action chimique résultant de l’affinité entre les deux substances, si chaque couche est formée par un corps simple (ce qui doit être très rare), ou entre les élémens, si l’une d’elle ou si toutes deux sont des substances composées. De là, formation de nouvelles combinaisons, explosions, déchiremens, élévation de température, et (dans le cas où l’une des couches au moins contiendrait des élémens divers) retour à l’état de gaz des élémens qui seraient séparés par le fait des nouvelles combinaisons, soulèvement de la surface par une sorte d’ébullition, enfin formation de matière solide toutes les fois qu’un des nouveaux composés produits exigerait, pour rester à l’état liquide, une température beaucoup plus élevée.

On sait quelle intensité de chaleur résulte des combinaisons chimiques, et combien ces températures sont supérieures à celles qui se produisent par la simple liquéfaction d’un gaz. Il pourra arriver ainsi que des couches inférieures, qui auraient été déjà solidifiées, passeraient de nouveau à l’état liquide, et dans le cas où la masse déposée serait déjà considérable, il faudrait un temps assez long pour que le centre, alors moins échauffé que la surface, se remit avec elle en équilibre de température.

Dans le moment où une de ces combinaisons viendrait de s’opérer, le maximum de température ne serait ni au centre ni à la superficie de la masse, mais sensiblement à l’endroit où la dernière couche reposerait sur la précédente, puisque c’est là que, suivant notre supposition, se développerait l’action chimique.

Ce ne serait qu’après beaucoup de bouleversemens, après que de grands morceaux de croûte déjà solidifiée auraient été soulevés par les élémens revenus à l’état gazeux, et en vertu d’un refroidissement ultérieur, que se pourrait former une croûte continue assez solide pour mettre obstacle à de nouvelles combinaisons chimiques. Mais, quand la température se serait abaissée de manière à permettre que, sur cette couche solide, vint se déposer une nouvelle substance à l’état liquide, susceptible de l’attaquer chi-