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INTRODUCTION À LA SCIENCE DE L’HISTOIRE.

elle-même, et tous les élémens actifs qui lui sont subordonnés ; les variations sont l’expression de toutes les difficultés qu’offre la réalisation, c’est-à-dire des luttes de diverses natures que l’homme est obligé de soutenir, soit contre le monde extérieur, brut et humain, soit contre le monde même de ses propres passions ; elles sont l’occasion et la preuve de son libre arbitre. Or, il faut prendre les diverses constantes sociales que l’histoire nous fournit, faire de chacune d’elles une spécialité ; et sous chaque titre spécial, ranger dans leur ordre de succession historique, c’est-à-dire par ordre de dates, les variations qui leur appartiennent, et dont elles sont, en quelque sorte, le siège. Ces classifications linéaires de faits par ordre de dates et d’après leur homogénéité, ou l’identité de la constante originaire, constituent ce que l’on appelle des séries, c’est-à-dire, par définition, une suite de grandeurs croissantes ou décroissantes. Les séries du genre de celles dont nous nous occupons sont très comparables aux progressions dites arithmétiques. Considérée d’une manière abstraite, l’histoire est propre aux mêmes usages scientifiques que toute autre collection de faits. Cependant cette méthode empruntée aux sciences mathématiques a, dans l’application à l’histoire, des lacunes, et laisse des doutes dans l’esprit. La formation des séries ne peut être opérée sans altérer, sous quelques rapports, la raison des choses sociales, ou le caractère unitaire de l’humanité ; cette opération laisse des hiatus qu’elle ne peut effacer. Il faut commencer par les séries les plus générales, mais on peut se tromper sur cette généralité même. Il n’est pas non plus facile de trouver les bases ou constantes qui doivent servir à la fondation d’une série. Il faut donc contrebalancer cette espèce de mathématique historique par l’intervention d’une autre science, de la physiologie individuelle. On ne peut nier que les facultés abstraites de l’humanité ne soient identiques à celles de l’individu. Si l’on se porte d’ailleurs à l’origine des premières sociétés, on trouve la manifestation des aptitudes, des besoins et des facultés de l’homme à leur état le plus simple, à l’état individuel. C’est un individu qui a inauguré la société ; c’est à la physiologie individuelle que nous demanderons l’indication des bases des séries sociales.


Considérations générales sur la physiologie individuelle. —