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ROLLA.

Le soleil l’a séché. — Sur le rocher brûlant,
Les lions hérissés dorment en grommelant.
Elle se sent fléchir ; ses narines, qui saignent,
S’enfoncent dans le sable ; — et le sable altéré
Vient boire avidement son sang décoloré.
Alors elle se couche, et ses grands yeux s’éteignent,
Et le pâle désert roule sur son enfant
Les flots silencieux de son linceul mouvant.

Elle ne savait pas, lorsque les caravanes,
Avec leurs chameliers, passaient sous les platanes,
Qu’elle n’avait qu’à suivre et qu’à baisser le front,
Pour trouver à Bagdad de fraîches écuries,
Des râteliers dorés, des luzernes fleuries,
Et des puits dont le ciel n’a jamais vu le fond.

Si Dieu nous a tirés tous de la même fange,
Certe il a dû pétrir dans une argile étrange,
Et sécher aux rayons d’un soleil irrité
Cet être, quel qu’il soit, ou l’aigle, ou l’hirondelle
Qui ne saurait plier ni son cou ni son aile,
Et qui n’a pour tout bien qu’un mot : la liberté.



iii.


Est-ce sur de la neige, ou sur une statue,
Que cette lampe d’or, dans l’ombre suspendue,
Fait onduler l’azur de ce rideau tremblant ?
Non, la neige est plus pâle, et le marbre est moins blanc.
C’est un enfant qui dort. — Sur ses lèvres ouvertes
Voltige par instant un faible et doux soupir ;
Un soupir plus léger que ceux des algues vertes
Quand le soir sur les mers voltige le zéphir,
Et que, sentant fléchir ses ailes embaumées