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ÆNEAS SYLVIUS.

haine, les dissimulations, la calomnie et même les injures, toutes choses que l’on ne parvient à surmonter que par l’excès de la patience. Si donc vous ne vous sentez pas le courage de jeûner trois jours, tenez-vous pour assuré que vous ne pourrez jamais supporter rien de grave en ce monde. Adieu. »

Comme les lettres d’Æneas Sylvius ont été classées par lui-même, nous ne séparerons pas la vingt-deuxième de la vingt-troisième. Le rapprochement est d’autant plus curieux qu’il a été fait par l’auteur. Ce sont des billets :


Æneas Sylvius, poète impérial, au révérend père Bartholomée, évêque de Novare :


Salut,

« Le nombre des bienfaits que j’ai reçus de vous est incalculable, et le ciel m’accorderait mille années d’existence, que je n’aurais pas le temps de vous en témoigner ma reconnaissance. Je ferai cependant, pour m’acquitter envers vous, ce qu’il est en mon pouvoir de faire. Nous n’avons rien de plus précieux que notre âme. Nous devons la soigner, la cultiver avant toutes choses. Tout le reste est passager, caduc et périssable. Comme l’âme est immortelle, si nous en prenons soin, elle nous fera goûter des joies éternelles, tandis que si nous la négligeons, nous sentirons par elle des douleurs sans fin. D’après ces considérations, j’ai résolu de vous offrir une suite de lettres qui ont été envoyées ici, à la cour royale, des pays orientaux. Elles sont remplies de conseils si excellens, que ceux qui les liront avec attention, et qui seront pénétrés des saintes vérités qu’elles renferment, ne peuvent manquer de gagner le bonheur de la vie éternelle. Adieu. »


Æneas Sylvius, poète impérial, à Berthold de Lunébourg, scribe de la chancellerie impériale :


Salut,

« Nous avons reçu la lettre par laquelle vous nous invitez à souper. Nous acceptons, et nous préparons nos estomacs. De votre côté arrangez-vous pour ne pas les renvoyer vides. Peu nous importe que l’hôte soit à la maison si les perdrix et les chapons le représentent à table. Quant à l’hôtesse, c’est autre chose ; nous la verrons volontiers, nous l’embrasserons même, et si cela lui convient, nous ferons mieux encore ; car, vous le savez, nous sommes gais comme des passereaux. Si vous avez quelques prétentions à des droits exclusifs, gardez-vous bien de venir là, parce que