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MÉTELLA.

nuelle angoisse de cette ame jalouse, épiant les moindres chances de sa défaite, s’aigrissant dans sa souffrance, et devenant injuste et haïssable à force de soins pour se faire aimer ! — Pourquoi m’exposerais-je gratuitement à ce tourment continuel ? pensait Métella. J’étais si calme et si heureuse il y a huit jours ! Je savais bien que mon bonheur ne pouvait pas être éternel ; mais du moins, il aurait pu durer quelque temps encore. Pourquoi faut-il que j’aille chercher une ennemie domestique, une pomme de discorde, et que je l’apporte précieusement au sein de ma joie et de mon repos, qu’elle va troubler et détruire peut-être à jamais ? Je n’aurais qu’un mot à dire pour faire tourner bride aux postillons, et pour reconduire cette petite fille à son couvent… Je retournerais plus tard à Paris pour la marier ; Olivier ne la verrait jamais ; et, si je dois perdre Olivier, du moins ce ne serait pas à cause d’elle !

Mais l’état de langueur de Sarah, l’espèce de consomption qui menaçait sa vie, imposait à lady Mowbray le devoir de la soigner et de la guérir. Son noble caractère prit le dessus, et elle arriva chez elle sans avoir adressé une seule parole dure ou désobligeante à la jeune Sarah.

Olivier vint à leur rencontre sur un beau cheval anglais, qu’il fit caracoler autour de la voiture pendant deux lieues. En les abordant, il avait mis pied à terre, et il avait baisé la main de lady Mowbray en l’appelant, comme à l’ordinaire, sa chère maman. Lorsqu’il se fut éloigné de la portière, Sarah dit ingénument à lady Mowbray : — Ah ! mon Dieu ! chère tante, je ne savais pas que vous aviez un fils ; on m’avait toujours dit que vous n’aviez pas d’enfans ?

— C’est mon fils adoptif, Sarah, répondit lady Mowbray ; regardez-le comme votre frère.

Sarah n’en demanda pas davantage, et ne s’étonna même pas : elle regarda de côté Olivier, lui trouva l’air noble et doux ; mais réservée comme une véritable Anglaise, elle ne le regarda plus, et, durant huit jours, ne lui parla que par monosyllabes et en rougissant.

Ce que lady Mowbray voulait éviter par-dessus tout, c’était de laisser voir ses craintes à Olivier ; elle en rougissait à ses propres yeux, et ne concevait pas la jalousie qui se manifeste. Elle était