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son essor est toujours réglé, et ne s’élève ni trop haut, ni trop bas. Il est calme, et non pas impétueux ; il a des mouvemens de tendresse, mais non pas des transports. C’est un homme d’une taille moyenne, d’une physionomie tranquille et mélancolique. Il jouit d’une grande estime, et il est de sa nature affectueux et obligeant.


Grahame. — Le poème intitulé Sabath (le dimanche) rendra long-temps le nom de Jacques Grahame cher à tous ceux qui tiennent aux pensées religieuses, et aux sentimens poétiques que cet ouvrage respire. Mais le mérite de Grahame se fonde encore sur d’autres bases. Ses Géorgiques anglaises, ses Oiseaux d’Écosse doivent être rangés au nombre de ces livres qui s’emparent doucement de l’esprit, et y laissent leur souvenir long-temps après que des œuvres plus vantées et plus bruyantes ont été oubliées. Il y a, dans toutes les descriptions de Grahame, une facilité naturelle, un mélange d’ombre et de lumière tel que l’offre le paysage, et une vérité d’après laquelle on peut croire qu’il consultait ses propres émotions, et peignait en s’en rapportant au témoignage de ses yeux, et non point, comme dit Dryden, « à travers les lunettes des livres. » Le public a rendu hommage à la piété profonde et à l’inspiration du poète, en accueillant plusieurs éditions de ses œuvres. Les Oiseaux d’Écosse forment une série de tableaux finement dessinés, où le plumage, la forme, le caractère, les habitudes de chaque espèce d’oiseaux se trouvent dépeints avec une fidélité égale à celle de Wilson[1].

Le drame de Marie Stuart manque de cette vigueur, de ce mouvement passionné que réclame le théâtre.

Les Promenades du dimanche, les peintures bibliques, et le Calendrier champêtre, sont des morceaux remarquables par l’exactitude des descriptions et le tour original des pensées.

Grahame naquit à Glascow le 22 avril 1765 ; son père le destina au barreau, mais il se livra de bonne heure à son penchant pour la poésie, et son amour de la vérité et de l’honneur l’eût toujours empêché de soutenir des causes dont il n’aurait pas reconnu scrupuleusement le bon droit. Son poème du Dimanche fut écrit et publié sous l’anonyme ; il eut la joie de compter la femme qu’il épousa au nombre de ses plus fervens admirateurs. Sa santé déclinait : il accepta la cure de Sedgemore

  1. Ornithologiste célèbre, qu’il ne faut pas confondre avec Wilson, le poète, directeur du Blackwood’s Magazine. Audiban l’Américain a dépassé récemment Wilson lui-même par la vérité pittoresque et l’énergie brillante des descriptions.