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la fin du ive (397-401), le bouddhisme y a établi de nombreux monastères, dont l’un a été quatre-vingts ans à s’élever. Ce qui place au iiie siècle, et peut-être au second, l’introduction du culte de Bouddha. Une légende, au reste assez plate, a du moins l’avantage de montrer l’origine que la tradition assignait au bouddhisme en le faisant apporter de Cachemire. On voit donc toujours depuis trente siècles le mouvement religieux et civilisateur partir du midi pour refluer vers le nord, et remonter des plaines de l’Inde sur les plateaux du Thibet. Ce qui n’empêche pas que primitivement le brahmanisme ne soit entré dans l’Inde par le nord ; mais ces premiers commencemens se perdent dans la nuit des temps, se cachent sous le silence ou l’obscurité des traditions, tandis que les voyages plus récens du bouddhisme, bien que leur début soit antérieur à l’histoire grecque et romaine, peuvent être suivis, et nous éclairent sur l’influence des idées indiennes, en attendant que nous en puissions débrouiller les origines.

Revenons du bouddhisme indien au bouddhisme chinois, qui doit faire aussi ses conquêtes, et d’où sortira le lamisme.

Nous avons vu les bouddhistes chinois repoussés du Thibet où ils voulaient substituer la grande doctrine à la petite, c’est-à-dire la théologie philosophique à la mythologie légendaire. Malgré cet échec lointain, le successeur des anciens patriarches de l’Inde, établi à la cour des empereurs de la Chine, continua d’être le premier personnage du bouddhisme ; il profita du voisinage de la majesté impériale, comme l’évêque de Rome de la majesté des souvenirs attachés au Capitole. Placé au centre du grand empire qui affectait un droit de souveraineté plus ou moins réel sur tous les peuples convertis au bouddhisme, le patriarche leur apparut comme le chef naturel de leur religion, comme une incarnation légitime de leur Dieu. Personne ne lui contesta la transmission authentique de la doctrine et de l’ame de Bouddha.

Telle fut l’origine de la suprématie du patriarche chinois. Le Thibet fut d’abord le pays qui la reconnut le plus difficilement. Tenant la doctrine d’une autre source, il ne faisait pas grand compte de ces prétentions. Mais, après la conquête de la Chine par les Mongols, quand les petit-fils de Gengis-khan menacèrent à la fois le Japon et l’Égypte, Java et la Silésie, le bouddha qui était alors à