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MORALE DE BENTHAM.

peines, et quant aux principes qui doivent les gouverner, il faut se référer à la liste des vertus et des vices. Si l’on examine le jeu des passions, on trouvera que les causes qui font que les influences de la passion dominent les influences de la raison, sont : 1o le manque d’intensité apparente dans le plaisir éloigné que promet la raison, le manque de vivacité dans l’idée de ce plaisir ; 2o le manque de certitude apparente, le manque de discernement immédiat pour remonter sur-le-champ l’échelle des effets et des causes qui favorisent ou empêchent la production des plaisirs lointains.

Entre les facultés intellectuelles et la vertu et le vice, il existe une relation intime. C’est à l’intelligence que tout s’adresse, et à moins qu’elle ne soit associée aux prescriptions de la morale, l’enseignement déontologique a peu de chances de succès. Bentham donne une classification des facultés intellectuelles qui n’a rien de neuf et de fécond.

Cet exposé dogmatique de la morale est suivi dans la publication nouvelle que nous examinons d’un coup d’œil sur le principe de la maximisation du bonheur, son origine et ses développemens. Ce travail appartient à l’éditeur, M. le docteur Bowring, qui l’a rédigé sur les papiers de Bentham, et expose le développement du principe de l’utilité depuis Horace :

Atque ipsa utilitas justi propè mater et æqui,

depuis Phèdre : nisi utile est quod feceris, stulta est gloria, jusqu’à David Hume, qui reconnut l’utilité comme principe, jusqu’à Hartley, jusqu’à Helvétius, jusqu’au docteur Priestley, qui publia en 1768 son Essai sur le gouvernement. Dans cet ouvrage, Priestley désigne le plus grand bonheur du plus grand nombre comme le seul but juste et raisonnable d’un bon gouvernement.

« Il arriva, » et ici nous croyons devoir citer les paroles mêmes de Bentham telles que nous les avons recueillies de sa bouche lorsqu’il nous racontait ce qu’il appelait plaisamment les aventures du principe de la maximisation du bonheur, à savoir, son origine, sa naissance, son éducation, ses voyages et son histoire ; « il arriva, je ne sais comment, que peu de temps après